Le soleil était déjà haut dans le ciel lorsque Valaka entreprit de faire une patrouille à travers le désert. Il faisait chaud, mais son pelage clair l'empêchait de souffrir des rayons brûlants de l'astre de feu. Elle vivait dans le désert depuis toujours, la sensation du sable sous ses pattes lui était familière. Elle n'avait que rarement ressentit le besoin de s'évader, et ne l'avait fait qu'une seule fois. A présent, elle n'avait pas l'envie brûlante de quitter le Grand Désert, elle voulait simplement se dégourdir les pattes, avancer sans avoir de réel objectif, juste marcher tout droit. Avec sa robe pâle, elle passait presque inaperçu parmi les dunes et le sol sec, craquelé, de ses terres. Néanmoins, plus elle avançait, plus le paysage devenait rocheux, lui indiquant qu'elle se trouvait à la lisière du territoire des Jangowas. Plus loin, Prideland lui ouvrait les bras, mais là n'était pas sa destination.

La lionne leva les yeux. Elle faisait désormais face au Mur de Roche, et partout autour d'elle, la terre était presque rougeâtre et la végétation pauvre. C'était à peine plus vert que dans le désert. Il y avait plus d'ombre par ici, la chaleur était moins étouffante. Valaka s'assit sur le sol presque frais, à ses yeux du moins, et porta son attention sur les Gorges, qu'elle pouvait voir de là où elle se trouvait. Elle avait quitté son territoire, une fois, il y a de cela quelques mois. Elle avait grimpé jusqu'à Prideland, mais ne s'était pas aventuré, mais cela avait suffit pour lui permettre de faire la connaissance d'un lion bien particulier... Elle tâcha de ne pas trop y penser, car ce souvenir lui rappelait le sentiment étrange qu'elle ressentait depuis longtemps qu'un secret habitait son enfance.

Elle ignorait si cette impression cachait une vérité ou s'il s'agissait simplement d'une pensée stupide qu'un regard un peu sombre lui avait mis en tête. La femelle haussa les épaules, et regarda autour d'elle. Tout était calme, il n'y avait rien à signaler. Les Jangowas veillaient à ce que personne n'entre sur leur terre, mais patrouiller par ici était en général assez vain. Les Pridelander savaient que leur chance de survie dans le désert était maigre. C'était plutôt les Mositus qu'il fallait tenir à l’œil ces temps-ci, mais Valaka répugnait à s'en prendre à eux sans raison. La guerre déclenchée par Akili lui paraissait cruel, mais elle gardait cette opinion pour elle, bien sûr. Pas question de s'attirer des ennuis avec l'Empereur. La Jangowa était en train de se relever, elle entendit des bruits de pas, des cailloux glisser, à quelques pas de là. Elle tourna la tête, pour voir, non loin d'elle, une lionne sablé aux oreilles particulièrement grande.

Valaka se remis rapidement sur ses pattes, et hésita. La robe aurait pu la tromper, car elle ressemblait à celles des Jangowas. Mais la femelle connaissait les membres de son clan, et elle n'avait jamais vu personne avec des oreilles de cette taille, ou elle s'en serait souvenu. Il s'agissait donc l'un d'un intrus. Elle devait donc se comporter d'une façon adapté, sans pour autant l'agresser, car Valaka n'était pas une grosse brute, comme la majorité de ses camarades du désert.

- Que faîtes-vous ici, étrangère ? Il n'est pas prudent de se promener seul sur les terres des Jangowas.

Si le ton de la lionne n'était pas menaçant, l'avertissement se trouvait quand même là. Cette vagabonde avait eu de la chance de tomber sur Valaka, car un autre n'aurait pas agit de la même manière.

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L'intruse paru très étonnée de voir la Jangowa se dresser devant elle, n'ayant visiblement pas entendu son arrivée. Valaka se tenait sur ses gardes, mais cette inconnue n'avait pas l'air belliqueuse. A présent qu'elle la voyait de près, elle pouvait presque en avoir la certitude. Un calme évident se lisait dans ses yeux d'un bleu profond, bien plus foncé que ceux de l'habitante du désert. Elle était en tous cas sur ses gardes, obéissant sans doute au dicton qui disait que prudence était mère de sûreté.

- J’ignorais que j’avais quitté les terres de Prideland.

La femelle fut surprise de l'ignorance de son interlocutrice, car en général, tous les lions savaient où commençait le territoire des Jangowas, et faisaient en sorte de ne pas s'y rendre, connaissant le caractère belliqueux de ces derniers. Cela ne semblait pas être le cas pour cette lionne-ci, qui semblait vouloir entamer la conversation.

- C’est de là bas que je viens. C’est le nom que porte votre tribu ? Qui a t-il par delà de ces limites ?

Valaka esquissa un sourire amusé devant l'avalanche de question à laquelle elle venait d'avoir droit et abandonna sa posture défensive. Elle s'assit sur le sol terreux, qui la changeait un peu du sable habituel, et regarda l'étrangère d'un œil plus doux. En vu de sa taille et de sa corpulence, elle n'était pas une jeunette, ni une matriarche. Elle semblait plutôt être une adulte, plutôt mâture, dont les grandes oreilles donnait une allure particulière à son visage. La Jangowa lui donnait peut être un an ou deux de plus qu'elle, d'après ses estimations personnelles. Il était assez difficile de donner un âge à ses semblables, à partir d'un moment, car le corps cessait de se transformer durant plusieurs années, et seuls quelques détails indiquaient le temps qui passe. Les lions plus âgé perdaient de leur vivacité, leur poil n'avait plus le même éclat et leurs yeux étaient moins pétillant. Ces éléments ne se retrouvaient pas chez l'inconnue, cela signifiait donc qu'elle était encore dans la fleur de l'âge.

La lionne se rendit compte qu'elle était toujours en train de dévisager son interlocutrice, son sourire espiègle toujours ses babines. L'intruse avait dit venir de Prideland, pourtant tous les Pridelanders connaissaient leur frontière, à l'exception des plus jeunes. Cette féline s'était sans doute rendu sur les terres de la fierté, mais elle n'appartenait probablement pas à ce clan. D'où pouvait-elle bien venir ? Avec un poil pareil, elle aurait très bien pu être une Jangowa, mais ce n'était bien entendu pas le cas. Valaka se décida néanmoins à lui répondre, consciente que le silence planait depuis quelques secondes.

- Mon clan se nomme en effet ainsi, nous sommes les Jangowas. Nous habitons le désert depuis des générations, car notre pelage très clair nous rend apte à y survivre.

Valaka pouvait sentir sa propre fierté dans sa voix, et en fut surprise durant un instant. Elle portait avec elle l'honneur de sa tribu, elle le savait bien, mais elle se sentait parfois si différente des siens, que se rappeler qu'elle possédait une véritable identité à son clan l'étonnait elle-même. Elle poursuivit, le regard tourné vers l'immensité des dunes de sables, cette fois.

- Par là bas, le désert se poursuit comme à l'infini encore et encore. Au fin fond de ce désert se trouve l'Oasis Oublié, là où vivent nos ennemis : les Mositus.

Étrangement, aucune haine ne se fit sentir dans la voix de la lionne lorsqu'elle évoqua le nom de leur rivaux. Elle ne les détestait pas, elle avait même pitié d'eux d'une certaine manière. Akili voulait leur mort, et il ferait en sorte de l'obtenir, tôt ou tard. Cette idée attristait la lionne aux yeux bleus, car elle n'était pas d'une nature belliqueuse et la perspective n'était pas pour la réjouir. La Jangowa reprit néanmoins, ignorant ses tracas personnels quant à l'avenir des siens,.

- Quant à moi, je m'appelle Valaka. Puis-je connaître votre nom ?

La femelle se souvenait bien que son interlocutrice était une intruse, mais après tout, pourquoi la chasser si vite ? Elle n'avait rien fait de mal, et s'était retrouvé là par erreur. Le Champ Rocheux n'était qu'une minuscule partie du territoire des Jangowas, et ils n'y allaient jamais. Pour une fois qu'elle avait l'occasion de discuter avec une étrangère, elle ne voulait pas s'en priver. Ici, elle ne ferait de mal à personne.

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Lorsque la lionne du désert avait évoqué la présence des Mositus, et le lien tendu qui existait entre ce clan et le sien, la curiosité de l'étrangère semblait avoir été piqué. Elle avait agitait ses grandes oreilles, dont la taille impressionnait toujours Valaka, et lui faisait penser aux oreilles des fennecs, ces petits renards des sables au physique si particulier, et avait pris la parole pour la questionner d'avantage à ce sujet.

- Vos ennemis ? Et pourquoi donc ?

Cette interrogation étonna la femelle aux yeux bleus, car elle était persuadée que les relations entre Jangowas et Mositus étaient connu de toute la terre des lions, en passant par le Royaume du Nord pour arriver jusqu'à Freeland. Néanmoins, elle ne devait pas oublier que son interlocutrice ne venait pas d'ici, et même si elle avait dit connaître Prideland, il était probable qu'elle ne soit qu'une voyage et non une habitante de ce royaume. Car les Pridelanders connaissaient la réputation des lions du désert depuis des générations, ces félins plus agiles et fins qu'eux, les meilleurs combattants, les farouches, ceux qui mettaient l'accent sur l'honneur avant tout. Voilà ce que tout un chacun était en droit de savoir sur les Jangowas, ce qui ne manquait pas d'effrayer les lionceaux et de calmer le courage, voir la témérité, des adolescents désireux de prouver leur bravoure en s'aventurant dans les terres des dunes.

- Je suis Tawiah. Pourquoi votre territoire a l’air si protégé ?

En voyant l'air interloqué de la vagabonde, Valaka compris que des explications s'imposaient afin qu'elle comprenne le fonctionnement du clan qui vivait dans ce vaste territoire de sable. Pour quelqu'un qui y avait toujours vécu, cela semblait de l'ordre de l'évidence, mais pour un parfait inconnu, qui mettait pour la première fois les pattes ici, l'idée qu'un peuple de lions puissent habiter là pouvait paraître incongru. Et que ce peuple se batte ardemment pour garder son sable, cela pouvait être tout aussi étrange. Pourtant, c'était d'une logique Jangowa excellente. Ils étaient les seuls à pouvoir vivre dans ce milieu hostile, c'était là leur fierté, et ils s'en sortaient sans mal, avec leurs habitudes de vie de nomade, en ne chassant que des proies de petite taille. Si d'autres lions venaient sur leur terre, ils s'installeraient dans leurs oasis, et prendraient leurs petites proies, sans oublier leur fierté de vivre ici.

Valaka ne partageait pas toutes ces convictions, mais elle savait à quel point c'était important pour Akili et pour bon nombre de ses sujets, aussi elle s'échinait comme tel était son devoir à protéger ce territoire qu'elle aimait, comme tout bon Jangowa, et à en faire fuir les intrus. Elle faisait certes une exception ici, par Tawiah, la lionne aux grandes oreilles, ne représentait pas une menace pour son clan, elle n'était même pas encore entré dans le cœur du désert. Il était clair qu'elle s'était retrouvée là par hasard, sans le moindre objectif de causer du tord aux Jangowas. De plus, ce n'était pas le genre de Valaka que de s'en prendre à un ou une inconnue sans avoir essayer d'instaurer le dialogue avant, elle n'était pas une grosse brute assoiffée de sang, elle. Elle commença son explication, gardant le ton amical qu'elle avait employé précédemment.

- Les Mositus sont nos ennemis car ils nous ont volé une parcelle de nos terres, il y a bien longtemps, lorsqu'ils se sont créés. Nous les tolérons depuis tout ce temps, mais mon Empereur ne compte plus se montrer si patient, je le crains... Nous vivons des temps difficiles.

Oui elle devait bien l'admettre, la guerre était sur le point de se déclarer. Akili avait déjà promis qu'il réglerait ses comptes avec les lions de l'Oasis, depuis qu'il avait découvert que les enfants que portait Léhona, sa compagne, n'étaient pas les siens mais ceux d'un Mositu. Il n'attendait qu'une bonne excuse pour lancer son attaque, et celle-ci ne tarderait pas à venir, Valaka pouvait le sentir. La lionne reprit néanmoins, d'une voix tranquille, répondant à la deuxième question de son interlocutrice.

- Ces terres, bien qu'arides et peu giboyeuses, sont à nous, et ce depuis des générations. Grâce à notre pelage et à notre manière de vivre, nous pouvons les habiter sans difficulté. Seuls les Jangowas peuvent vivre dans le désert, et cela nous rend fier. Voilà pourquoi nous protégeons notre territoire avec tant d'ardeur. Les Pridelanders sont plus laxistes sur les intrusions, ce n'est pas notre cas.

Evidemment, ceux qui étaient d'avantage concerné par cette règle étaient les Mositus. Akili avait assuré qu'aucun d'entre eux ne sortiraient de l'Oasis Oublié sans se faire écorcher vif, et tous ses guerriers s'assuraient que sa promesse soit tenu. La haine du vieil Empereur envers les lions bruns était impressionnante, et à glacer le sang. Mais cela convenait à la majorité des Jangowas, qui n'attendaient que de pouvoir se débarrasser de ces intrus afin de récupérer l'Oasis et le monopole complet du désert.

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L'étrangère paraissait attristé des conflits qui régnaient entre les clans du désert, et cette attitude étonna Valaka. Tawiah n'avait-t-elle pas un clan elle aussi ? Tous les clans connaissaient la guerre, tous les clans se battaient pour leur survie et leur prospérité, ce n'était pas quelque chose de particulièrement bizarre. Certes, les batailles étaient cruelles car elles amenaient la mort de beaucoup de lions, qu'elles privaient parfois les enfants de leur parent, qu'elles transportaient haine et désolation autour d'elles... Mais c'était un mal nécessaire, une souffrance qu'il fallait accepter, surtout si l'on était un Jangowa. La femelle aux yeux bleus clair avait compris depuis longtemps qu'elle était obligée de se plier aux volontés belliqueuses de son clan, car elle ne pouvait rien y faire.

- Il n’y a donc pas moyen pour vous de cohabiter ensemble ? Les Mositus vous cherche des problèmes ? J’ai l’impression que partout où je vais, des tensions règnent entre les lions, inévitablement.

Valaka hocha doucement la tête, elle aussi chagriné par ce constat, mais las d'imaginer qu'elle pouvait changer les choses. Les lions avaient en eux une nature de guerrier qui les poussait à se battre entre eux, à vouloir le pouvoir, la reconnaissance, des terres plus grandes... Cette avidité conduisait les clans à leur perte, car au lieu de ne faire qu'un pour devenir plus fort, ils se divisaient et n'éprouvaient que haine les uns pour les autres. Elle avait entendu dire que des conflits éclataient aussi du côté de Prideland, que l'heure était sombre aussi pour cette partie là de la terre des lions. Des alliances s'étaient sans doute formé, car beaucoup de clans cohabitaient, mais elles ne seraient que temporaire et bientôt, ils lutteraient au sein de leur propres amis, car telle était la loi de la survie. C'était une chose terrible, pourtant il était impossible d'aller à l'encontre de la nature des lions. Tawiah semblait toujours déconcerté par les explications de la Jangowa quant aux conflits qui existaient entre son clan et les Mositus.

- Mais si personne ne s’accepte, il y aura toujours des batailles… Inévitablement. J’en sais quelque chose.

C'était en effet pour cela qu'Akili avait l'intention de détruire les Mositus. L'idée faisait frémir Valaka, car elle ne parvenait pas à concevoir que l'on puisse annihiler tout un clan comme ça, et le faire serait absolument ignoble... Pourtant, que pouvait faire la lionne face à son Empereur ? Lui seul pouvait prendre des décisions, elle n'avait pas son mot à dire sur la question, elle qui n'avait aucune responsabilité parmi les Jangowas, et qui était bien loin d'en vouloir.

- J’ai tout de même du mal à comprendre toutes ces limites entre les territoires… Même s’ils existent, pourquoi personne ne peut se promener librement ? Si vous êtes les plus solides pour survivre dans le désert, pourquoi empêcher à ce point là les autres de s’y risquer. Je ne chercherai pas à contourner vos règles, mais ma vision des choses est tellement différente de celle que vous m’expliquez que j’ai du mal à en saisir vraiment les raisons, malgré vos explications. Mes utopies ont l’air d’être à mille lieux de celles des autres lions…

La femelle du désert comprenait bien le désarroi de son interlocutrice, et ne lui en voulait pas de parler librement. Elle ne voulait pas se bercer d'illusions, elle savait que son clan était cruel et avait des ambitions néfastes, visant le meurtre de dizaines de lions sous prétexte qu'ils s'était installé au mauvais endroit. Elle non plus ne souhaitait pas ces guerres et aurait largement préféré pouvoir vivre en paix avec les Mositus, sans querelle, sans combat, sans l'interminable attente de l'assaut qu'Akili voulait lancer. Valaka n'aimait pas tellement l'Empereur, il avait beaucoup de haine en lui mais sa force était reconnue par tout le clan et il semblait impensable que quelqu'un prenne sa place dans l'immédiat. Un jour, un lion plus jeune et plus solide le défierait pour acquérir le trône, mais l'heure ne semblait pas encore venue. Lorsqu'un successeur apparaîtrait, il n'y avait plus qu'à espérer qu'il soit moins belliqueux qu'Akili. Comment expliquer toutes ces choses à Tawiah ? Elle ne connaissait pas les us et coutumes des Jangowas, il était difficile de les comprendre vu de l'extérieur. Mais les choses étaient bien plus complexe qu'elles en avaient l'air.

- Je suis aussi chagrinée que vous par tous ces conflits. Là n'est pas le destin que j'aurais voulu pour les miens. J'ai un fils, et je souhaite qu'il ne connaisse pas l'horreur de perdre un de ses parents durant la guerre. Il y a tant de choses que j'aimerais lui éviter...

Elle hésita, devait-elle continuer ? Elle s'apprêtait à entrer dans un terrain miné, à évoquer des choses qui ne concernaient que les Jangowas. Mais après tout, pourquoi pas ? Tawiah n'était pas une Mositu, ni même une Pridelander. Elle ne semblait pas être lié à un clan, pas ici en tous cas. Peut être venait-elle de loin. Valaka n'en savait rien, mais elle poursuivit, d'une voix sombre, le regard chargé d'incertitudes.

- Mon Empereur veut se débarrasser des Mositus, car ils considèrent qu'ils sont une menace, et compte bien les faire tous disparaître. Si cela pouvait offrir à mon fils une vie sans bataille, sans larme et sans cri, alors je trouverais en moi la force de me battre, même si cette guerre va à l'encontre de mes valeurs.

En parlant ainsi, la Jangowa admettait qu'elle ne soutenait pas Akili dans ces décisions, et cela pouvait lui porter préjudice. Enfin, cela aurait pu lui causer du tord si elle l'avait dit à un membre de son clan, qui aurait sitôt fait de la dénoncer. Elle aurait alors été accusé de trahison envers l'Empereur, et sans doute aurait-elle du s'exiler. C'était toujours mieux que la mort.

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Valaka avait une expression sombre sur son visage, perdue dans ses sombres pensées. Elle ne parvenait pas à chasser de son esprit les décisions qu'elle allait bientôt devoir prendre, les choix qu'elle allait faire et qui risquaient de bouleverser toute sa vie sans qu'elle ne puisse réellement changer quoi que ce soit.

- On ne peut que souhaiter une vie la plus agréable possible pour eux, qu’importe les sacrifices.

Les paroles de Tawiah laissèrent entendre à la lionne du désert que son interlocutrice parlait en connaissance de cause, ce qui n'était pas si étonnant. La voyageuse devait avoir l'âge de Valaka, si ce n'était plus, il était courant que les femelles aient au moins un portée au cours de leur vie. Même une lionne sans clan pouvait avoir des enfants, après tout. Les deux félines échangèrent un long regard pendant que la Jangowa exposait la situation des siens, et un lien sembla se créer entre elles. Leurs histoires étaient-elles similaires ? Tawiah avait-elle du faire des choix difficiles pour sa progéniture ? Cela n'aurait finalement pas étonné Valaka, car une sagesse évidente se lisait dans les yeux de la solitaire, une sagesse que l'on ne pouvait acquérir que par l'expérience, en affrontant une réalité douloureuse. Longtemps, la lionne au pelage clair avait cru vivre une existence paisible, tout en se doutant que les choses n'étaient pas si belles. Elle avait des doutes sur ses parents, craignait les décisions d'Akili, et sentait cette guerre pesait sur eux, sur elle, comme un poids très lourd sur ses épaules.

- Protégez le, c’est tout ce qu’il vous reste à faire. L’instinct maternel est le plus pointu, j’ai un lion moi aussi et mes sens n’ont jamais été aussi aiguisés qu’avec lui. Nos enfants sont nos plus précieuses ressources. J’espère vraiment que vous arriverez à le protéger de tout ça.

La Jangowa hocha doucement la tête, le regard embrumé. Elle priait également de toutes ses forces les esprits de jadis pour parvenir à défendre Jango du mieux qu'elle le pouvait, faisant de son corps une barrière pour le sien. Mais elle ne pourrait pas toujours être là pour le couver, il allait devoir apprendre à s'en sortir seul, et bien plus tôt qu'il ne le pensait. L'exil des adolescents mâles l'attendait dans bien peu de temps et Valaka ne pourrait pas veiller sur lui durant ce temps là. Il était difficile pour elle de l'accepter, car elle souhaitait le protéger tout au long de sa vie, mais c'était impossible. Il lui restait encore quelques mois d'innocence, que la guerre viendrait souiller et entacher du sang des Mositus.

- Il est encore jeune ou bien est-il déjà apte à se battre ? Ils perdent leur innocence si tôt…

La question fit frissonner la lionne. Imaginer Jango dans le feu de la bataille, lui si petit, si frêle... C'était inconcevable ! Il était finalement une bonne chose qu'il soit encore un enfant, il évitait ainsi à l'horreur de la bataille, mais pas au risque de perdre ses parents. Valaka secoua la tête et esquissa un sourire. Tawiah semblait partager ses craintes et sa vision des choses, ce qui était une première pour elle. Les femelles Jangowas aimaient leurs enfants, certes, mais le clan passait avant tout, c'était dans la logique des choses. Elles pensaient que c'était le mieux à faire pour leur progéniture, et c'était ce que Valaka tentait de se convaincre également. Mais il y avait autre chose qui brûlait en elle, et qui la poussait à se révolter contre ce massacre que prévoyait Akili.

- Que les Grands Esprits en soient remercié, il n'est qu'un lionceau ! Même s'il le voulait, il ne pourrait pas prendre part à la bataille. Je préfère le savoir en sécurité avec les autres enfants, loin du champ de bataille. Nous autres Jangowas sommes réputé pour être les plus puissants guerriers de la Terre des Lions, mais nous sommes loin d'être immortel.

L'idée de sa propre mort, elle l'avait envisagée déjà par le passé, lorsqu'elle songeait à la guerre qui approchait. A présent qu'elle était sur le point de tout ravager, la question ne se posait même plus. S'il le fallait, que la vie de son fils était en péril, elle n'hésiterait pas un instant. Néanmoins, risquer de mourir, et s'en prendre à des innocents sur la décision d'un seul lion... Ce n'était pas dans ses valeurs. Elle ne voulait pas prendre part à ce qu'elle considérait comme un crime, comme une entorse à ce qu'elle croyait juste. Valaka poussa un profond soupir, sentant de nouveau toutes ces difficultés l'assaillir. Elle plongea son regard dans celui de Tawiah, et se mis à envier le sort de la voyageuse. Elle n'avait pas de clan, pas de chef à qui obéir et qui pouvait aller à l'encontre de ce qu'elle désirait. Néanmoins, c'était parmi les Jangowas que Valaka s'était construit et avait découvert ses véritables valeurs. Que serait-elle sans les siens ?

- Vous avez bien de la chance de ne pas connaître ces tiraillements, vous qui pouvez aller où bon vous semble sans devoir de loyauté à qui que ce soit. Il m'arrive de rêver d'une telle vie, mais... Mais je crois en mon devoir, et peut être est-ce qui me perdra, dans un sens, ou un dans un autre.

En effet, si son devoir la poussait à choisir ses valeurs plutôt que son clan, elle risquait bien plus gros que l'inverse. Akili ne connaissait pas la pitié, et surtout pas envers les traîtres. Si décision elle devait prendre, cela ne devait se faire sans réflexion.

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Le regard de la lionne du désert se perdit dans le vague, derrière l'épaule de la voyageuse. De là, elle pouvait voir le sommet des Gorges, là où elle avait fait la connaissance d'Alois, un Pridelander bien particulier avec lequel elle avait eu une grande conversation. Un instant, elle se demanda comment les choses se passaient, de son côté de la Terre des Lions. Les vents soufflaient qu'une guerre se préparait, là bas également, mais qu'en était-il vraiment ? A quoi ressemblait la vie, ailleurs ? L'existence de Tawiah était risquée, car cette dernière ne pouvait pas compter sur un clan pour la protéger, elle devait se débrouiller seule. En contrepartie, elle était libre, n'avait de compte à rendre à personne et pouvait voyager au grès de ses envies. Etait-ce cela que voulait Valaka ? Être seule ? Non, elle n'y avait jamais rêvé. Elle aurait simplement aimé qu'on lui retire ces chaînes qui l'empêchaient d'être elle-même, avec les siens mais également avec son propre cœur. La fierté et l'honneur étaient les valeurs qu'on lui avait enseignées, mais étaient-ce celles qu'elle voulait suivre tout le long de sa vie ? Elle n'en était plus sûr à présent que son devoir était de tuer des innocents.

- Est-ce que vous avez déjà envisagé de partir ?

La question de la voyageuse la fit revenir durement à la réalité. Elle cligna des yeux et croisa le regard de la lionne aux grandes oreilles, sentant son cœur se serrer. Jamais, jamais elle n'avait pensé à pareille chose. Jamais, jusqu'à aujourd'hui. Enfermé dans sa vision des Jangowas, elle avait été persuadé durant tout ce temps que c'était la seule voie possible et imaginable pour elle, sans se rendre compte de la cruauté de certains actes. Elle ouvrait les yeux aujourd'hui, sur cette menace qu'Akili avait lancé : "Nous les décimerons tous." Il l'avait dit, mot pour mot, dans un excès de rage et de haine envers leurs ennemis. Et aujourd'hui, il les préparait tous à exécuter cet ordre funeste et tragique, que Valaka trouvait injuste et monstrueux. Pourtant, une fois encore, que pouvait-elle bien dire ? Que pouvait-elle bien faire ? Partir ? Quitter sa terre, son territoire, sa famille, son clan ? Et pour aller où ? Devenir une hors la loi ? Comment protéger son fils si elle se retrouvait seule ? Devait-elle lui faire courir le risque de l'emmener ou le laissait parmi ces lions qu'elle redécouvrait ?

La détresse se mis à luire dans les yeux de la femelle, alors qu'elle cherchait vainement une réponse dans les yeux de son interlocutrice. Qui donc pouvait lui dire quoi faire ? A qui exposer son problème ? Elle s'était confiée à une étrangère, une intruse, mais cela lui était bien égal. Tawiah était une lionne, elle était une mère, elle pouvait la comprendre. Valaka comprenait ce choix de vie, et encore mieux à présent qu'elle l'envisageait pour sa propre famille. Pouvait-elle seulement demander pareil sacrifice à son compagnon ? Et à son fils, qui était si heureux ? Pouvait-elle réellement briser tout cela, pour être en accord avec ses valeurs ? Irait-elle jusque là ? Ce chemin n'avait jamais été le sien. Pas pour elle, la Jangowa qui se fondait parfaitement dans la masse. Comment expliquer qu'aujourd'hui, elle se sente si différent de sa propre famille ? Comme pour faire écho à ses pensées, Tawiah ajouta :

- Dans tout les cas c’est un choix difficile. Les premiers jours, il m’est arrivé de regretter, aujourd'hui, je me sens mieux, mais c’est vrai qu’il n’y a pas de retour en arrière possible généralement. Le meilleur choix que l’on peut faire, c’est celui que l’on fait pour le bien être de nos enfants.

Valaka hocha doucement la tête, comprenant bien les enjeux de sa propre décision. Ce n'était pas quelque chose à prendre à la légère, elle en avait conscience et cela lui pesait énormément. Elle aurait aimé fermer les yeux et s'oublier durant quelques heures, oublier toutes ces querelles et ses conflits intérieurs pour s'envoler paisiblement vers un ailleurs plus heureux. Ce n'était malheureusement pas possible, pas à l'heure actuelle. Elle s'était évadée lors de sa rencontre avec Alois, qui lui avait donné la sensation de ne plus être une Jangowa en train de parler avec un Pridelander, mais d'être simplement une lionne discutant avec un ami. A présent qu'elle était avec Tawiah, toutes ses responsabilités, tout ce poids revenait s'abattre sur elle avec violence. Elle ravala la boule qui était en train de se former dans sa gorge et déclara, d'une voix éraillée.

- Il ne sera pas facile de prendre une décision. Jusqu'à présent, je n'avais jamais réellement envisager de quitter mon clan, mais plus cette guerre approche... Plus il me semble que c'est la seule solution, si je veux rester ce que je suis. Je ne veux pas devenir un monstre pour obéir à mon Empereur...

Sa voix n'était plus qu'un faible murmure, tandis qu'elle contemplait la voyageuse. Comme elle l'avait supposé, Tawiah avait appartenu à un clan par le passé mais l'avait quitté, pour des raisons qui lui étaient propre. Souffrait-elle encore de cette décision ? Valaka serait-elle un jour dans la même situation que la vagabonde ? L'hypothèse était à l'heure actuelle envisageable.

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- Les pressentiments, les premiers, ce sont à ceux là qu’on doit se fiez.

Les paroles de la lionne aux grandes oreilles sonnaient étrangement dans l'esprit de Valaka. Elle repensait à ses doutes, à ses suspicions sur son passé, sur le secret que ses parents semblaient lui dissimuler, puis à ce que lui avait dit Alois, ce Prideland atypique qui lui avait conseillé d'aller au bout de ses recherches, même si elle n'avait qu'un fragment d'idée pas encore concret. Il l'avait incité à s'accrocher à son enquête, et à ne pas se laisser bercer par des illusions, ce qu'elle avait pourtant tendance à faire. Certes, Tawiah n'avait pas prononcé ces mots dans cette optique, mais c'était ainsi que la Jangowa les interpréter. Elle remarqua alors que la vagabonde était en train de se relever, ce qui annonçait peut être son départ. Il était vrai que les deux femelles avaient longuement discuté, Valaka n'avait aucune idée du temps qu'il s'était écoulé. Et justement, la voyageuse pris la parole, et ses mots avaient les effluves d'un au revoir.

- Quoi qu’il en soit, peut être nous recroiserons nous ? Peut être pas dans le désert… Mais peut être ailleurs. Après tout, il ne faut jamais dire jamais, j’ai pendant longtemps cru que je ne quitterai jamais ces autres lions que je fréquentais, et pourtant, me voilà aujourd’hui face à vous. Le destin fait parfois les choses bien étrangement. Et provoque aussi des rencontres inattendues.

La lionne aux pelage du désert hocha doucement la tête en esquissant un sourire. C'était bien vrai et cela s'était confirmé à deux reprises pour elle. Aujourd'hui, avec Tawiah et il y a quelques mois, lorsqu'elle avait fait la connaissance d'Alois. Sauf qu'à l'heure actuelle, elle était dans la même situation que le Pridelander lors de leur rencontre. Elle devait accomplir son devoir de Jangowa, même si elle n'avait pas envie de chasser sa nouvelle amie. Même si les deux lionnes se vouvoyaient et ne savaient pas grand chose l'une de l'autre, un lien sincère semblaient les relié désormais, d'une façon de plus singulière. Elles se ressemblaient, par bien des attraits, comme si leur histoire respective avait suivit le même chemin. Valaka se demanda si elle aurait le même sort que sa camarade aux grandes oreilles, ne parvenant pas à savoir si ce serait une bonne chose, ou une pure tragédie. Ce n'était pas ce qu'elle avait rêvé pour son avenir, ni pour son enfant, mais si c'était ce que les Grands Esprit avaient décidé, alors que pouvait-elle bien faire ?

- Si un jour l’occasion arrive, sachez que je serais en tout cas ravie de parcourir un morceau de chemin avec vous Valaka, même s’il n’est qu’éphémère. Et que malgré tout, vous trouverez ce que vous chercher dans votre désert.

Le sourire de la Jangowa s'adoucie d'avantage, et son regard devint moins trouble. Elle ne devait pas craindre l'avenir, ni l'appréhender. Si les choses devaient se passer ainsi, alors elles le feraient. Si le destin voulait que Valaka reste dans son clan, alors peut être qu'il en serait mieux ainsi. Elle devait faire confiance en ses choix, en ses principes, et en ce que le futur lui préparait. Rien n'était immortel, voilà ce qu'elle devait retenir. Un jour peut être cheminerait-elle aux côtés de Tawiah, elle n'en savait encore rien, et ne devait pas s'en inquiéter. Elle parviendrait toujours à retomber sur ses pattes, car elle était vaillante, elle était forte. La femelle s'avança pour saluer la voyageuse et la regarda partir, en déclarant d'une voix où sa bienveillance perçait :

- Nos routes se recroiseront, j'en ai une la clair certitude. Prenez garde si vous revenez ici, tous les Jangowas ne sont pas des pacifistes, loin de là. Soyez prudente, des choses inquiétantes se trament sur la Terre des Lions, vous n'avez pas à être mêlé à ça.

Sans savoir exactement ce qu'il se passait de l'autre côté de ma frontière, elle avait entendu un vent de panique souffler au loin, comme si des ennemis invisibles et terrifiants se dirigeaient vers Prideland. Quel danger pouvait-il bien menacer ce clan si puissant ? Valaka n'en avait aucune idée, et n'avait pas le temps de se renseigner. Sa propre tribu avait besoin d'elle, elle le savait. La Jangowa regarda donc la vagabonde quitter le désert, et sentit au fond d'elle que des choses avaient changé. Beaucoup de chose.


[Une fin un peu courte, mais je conclue le RP ! Merci beaucoup pour ce topic très important pour l'évolution de Valaka ! Il faudra impérativement refaire un RP une fois l'event fini !]

Rapport du matin ♪


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DC de Baradi / Haki