Le matin s'était levé depuis peu et la mission du jour du roi était de se rendre auprès de Kuzaidia pour voir comment les grands brûlés se portaient. Lors de l'incendie, même si les dégâts commis par le feu avaient été rare, quelques lions étaient revenus avec des brûlures assez importantes. Parmi eux, une lionne dont Azaan ne se souvenait pas du nom, avait la majorité de l'avant de son corps brûlé. Il avait pensé qu'elle ne survivrait pas, mais celle-ci avait pourtant survécu. Un miracle pour le roi. Certains n'avaient pas eut sa chance et étaient morts dans les jours ou les semaines qui avaient suivit cette attaque.

Le vieux mâle se déplaçait dans le repère des lions à la recherche de son amie mandrill. Il avait une petite idée d'où la trouver, en général, il la croisait toujours au même endroit ou à proximité. Mais lorsqu'il arriva, la crevasse était vide de toute vie. Le roi regarda autour de lui, interrogea quelques Pridelanders et Freelanders mais personne ne savait où était Kuzaidia. Un peu décontenancé, Azaan s'éclaircit la gorge avant de décider qu'il reporterait cette visite à plus tard dans la journée. Après tout, il pouvait se permettre de décaler ses activités. Et il reprit son chemin pour retrouver Sazana et Moha. Il en profiterait pour essayer de lui apprendre quelques leçons.

Mais alors qu'il se dirigeait vers sa famille, il vit la lionne dont les brûlures étaient fort étendues. Peut-être pourrait-il se renseigner auprès d'elle ? Après tout, elle pourrait surement lui apporter des informations, elle était elle-même victime de ce mal. Alors il approcha d'elle d'un pas décidé et avec le sourire.

" Bonjour à vous. "

Dit-il poliment en faisant un signe respectueux de la tête.

" Auriez-vous quelques minutes à m'accorder ? "

Demanda-t-il en essayant de se rappeler le nom de la lionne. Mais rien ne lui revint ... Peut-être ne l'avait-il jamais connu. Enfin, Kuzaidia avait surement dû le lui dire, mais il devait surement être tellement choqué par l'attaque et la vision des dégâts sur certains de ses sujets qu'il n'avait surement pas écouté. Si seulement cela pouvait lui revenir, il aurait surement l'air moins bête, mais retenir le nom de tous les lions du clan était difficile, encore plus pour un vieux lion comme Azaan.

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Namiri fulminait.
Kuzaida soupçonnait que c’était la rage de vivre qui l’avait sauvée et qui guérissait ses blessures. Lors de l’incendie qui avait détruit le territoire du Rocher des Lions voilà un an, la lionne avait subi des brûlures telles qu’elles auraient pu lui ôter la vie du corps. C’était une vraie grâce qu’elle ait encore ses deux yeux pour voir. Namiri n’était plus toute jeune, mais elle avait la robustesse pour elle.
Pourtant, la femelle mandrill l’avait encouragée à voir le bon côté des choses et à constater la chance inouïe d’avoir survécu à une telle catastrophe et de guérir si bien… Mais rien n’avait sur entamer sa colère, et Namiri fulminait toujours.

Elle fulminait parce qu’elle ne se sentait bonne à rien. Le feu avait réduit son odorat et elle avait l’impression de ne sentir presque plus rien dans la brise. De plus, elle avait la désagréable impression, lorsqu’elle humait l’air, de discerner encore l’odeur des flammes, des poils et de la chaire brûlés. Sa peau sensible et nue ne supportait plus les rayons du soleil qu’il dardait comme des lances sur ses larges cicatrices. Namiri se sentait incapable et indigne de la terre qui l’avait élevée et qu’elle avait juré de protéger avec la même ferveur que les Gardiens. Elle était en colère parce que les hyènes, qu’elle considérait si mal, avait chassé son noble clan de son territoire et l’avait détruit. Elles les avaient réduits à l’état de clan vagabond, sans possessions, sans lois, sans plus aucun prestige. Cela, elle ne le tolérait pas.

Depuis l’ombre de l’acacia compatissant sous lequel elle se tenait allongée, Namiri tourna la tête vers l’horizon, en direction de sa terre natale. Là-bas, elle le sait, entre les cendres qui composent l’immense désolation qu’est aujourd’hui Prideland, très doucement, les plantes se remettent à pousser.
Elle chassa une mouche d’un geste d’oreille.

« Bonjour à vous. Auriez-vous quelques minutes à m'accorder ? »

C’est le roi. Namiri inclina respectueusement la tête et se tassa un peu en signe de soumission.

«...Namiri, majesté. Comment puis-je vous aider ? »

La lionne se tourna vers lui à l'entente de son appel et elle s'inclina respectueusement devant lui. Azaan lui sourit. Il s'était finalement fait à ce genre de choses, même si au début, il s'était sentit très mal à l'aise devant ces marques de soumission. Mais il avait vite compris que ce n'était pas non plus pour que son peuple s'abaisse devant lui, cela semblait leur plaire car ils aimaient la famille royal. Quelque chose que Freeland avait perdu, en revanche.

" Namiri, c'est bien cela. Ma mémoire me fait défaut comme vous pouvez vous l'imaginer. "

Dit-il en plaisantant et en riant un peu de sa voix grave et rauque de vieille personne.

" Voyez-vous, je voulais trouver Kuzaidia afin qu'elle puisse me donner des nouvelles des Pridelanders qui ont été blessés lors de l'incendie, voir si tout le monde se remet bien. "

Il n'en dit pas plus, ne voulant pas non plus la blesser et lui rappeler le fait que son corps était marqué à vie. Si Azaan arrivait à ne pas la dévisager, ce n'était malheureusement pas le cas de tout le clan. Les Pridelanders étaient de nature assez respectueuse, mais il était difficile de ne pas regarder ses cicatrices particulièrement grandes. Pour les enfants, c'était également impressionnant et cela mettait le roi mal à l'aise d'imaginer que certains de ses sujets se sentent mis de coté alors que ceux-ci ont parfois reçu ces blessures en agissant pour le bien du clan.

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Il était vrai, le roi Azaan n'était déjà plus tout jeune. C'était également pour cela que Namiri le respectait : il était son aîné et investi d'une sagesse qui lui donnait confiance et foi en son règne. Elle savait que sous sa direction le clan serait toujours sauf et que le cycle de la vie serait toujours protégé et entretenu.

« Voyez-vous, je voulais trouver Kuzaidia afin qu'elle puisse me donner des nouvelles des Pridelanders qui ont été blessés lors de l'incendie, voir si tout le monde se remet bien.

La lionne se redressa et s'ébroua lentement. Ça.
Elle prit une longue inspiration et contourna le roi d’un pas lent et alla s’asseoir un peu plus loin, face au paysage.

– Kuzaida enterre l’ancienne Harati au moment où l’on parle, répondit la lionne de sa voix râpeuse et monocorde. Elle dit que ses blessures ont rongé son corps jusqu’à son esprit et ont fini la pourrir vivante. Elle dit aussi que c’est sa vieillesse qui l’a rattrapée… (Elle soupira.) Tôt ou tard, l’âge finit par réclamer les dettes de notre jeunesse. Harati était lionne vaillante et sa volonté et sa détermination étaient inébranlables. L’idée qu’elle soit morte loin de la terre qui l’a vue naître et à laquelle elle devait être rendue me chagrine d’autant plus. Elle voulait mourir là-bas, murmura Namiri en désignant l’horizon du bout de son museau brûlé.

La lionne se tut un instant pour laisser parler la brise du nord qui frôlait les feuillages et les hautes herbes, sifflait rageusement lorsqu’elle s’écorchait sur les anfractuosités des murs de pierres qui formait leur abri provisoire. Namiri se rappela de la vieille Harati à ses dernières heures, alors que la mort était à son chevet. La pauvre soliloquait nuit et jour, ne savait plus ni où, ni quand, ni même qui elle était. Personne n’avait su si elle était encore consciente à ce moment là.

– Mon roi, dites-moi, quand rentrons-nous chez nous ? Cela fait un an que votre peuple attend. »

Les nouvelles que la lionne apportait au roi le firent baisser la tête et les oreilles. Il afficha une mine sombre. Bien qu'il ne connaissait pas personnellement tous ses sujets, la mort de chacun d'entre eux l'affectait. Encore plus lorsqu'il s'agissait de lions qui avaient subit des blessures qui étaient dues au climat politique. Azaan se sentait particulièrement responsable de cela et il voyait cette mort presque comme si c'était lui qui n'avait pas été capable de la sauver. Il se tourna vers la lionne qui s'était un peu éloignée et il s'approcha de quelques pas.

" Je suis navré pour Harati. Kuzaidia a surement fait son possible avec elle, mais il y a des blessures qui ne peuvent être soignées. "

sa voix rauque à cause de l'âge semblait accrocher encore plus dans sa gorge à cause de la gravité de la situation. Namiri enchaîna en demandant dans est-ce que le peuple allait enfin pouvoir rentrer. Il en était désolé, mais un an après l'incendie, les Pridelanders étaient toujours aussi et les malheureux qui avaient trouvés la mort ici n'avaient pas pu être emmené sur leurs terres natales.

" Malheureusement, je ne peux encore le dire. Les gardiens sont toujours à le recherche des troupeaux. Sans eux, nous ne pourrons rentrer. "

Si il essayait de toujours afficher un air calme et détaché, le roi était cependant tourmenté par cette problématique. Il vieillissait à vue d'oeil et il commençait à craindre que jamais il ne pourrait rentrer chez lui. Si l'enquête tardait encore, même encore en vie, il ne pourrait effectuer le trajet du retour et il devrait passer le pouvoir à sa compagne en attendant que Moha soit en âge de gouverner.

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Namiri resta immobile. Son regard quitta la ligne d'horizon avant de venir se poser sur la pierre en face de ses pattes, résorbant par la même occasion l'espoir qu'elle avait laissé un peu trop échapper de ses yeux. La réponse du vieux roi ne la surprenait pas, mais même en comprenant sa sagesse, elle la décevait.
Elle le sentait, dans la brise qui leur venait du Nord, la solitude du Rocher des Lions, ses terres meurtries qui appelaient à l'aide au travers des jets de poussières et de cendres, mais aussi de pollen nouveau. Ces terres qui commandaient aux Pridelanders de revenir prendre soin d'elles et de l'aider à recouvrer la vie. C'était leur rôle.

« Ne peut-on pas accélérer les choses ? Bientôt, le territoire que nous avons abandonné sera de nouveau fertile et d'autres clans chercheront à s'en emparer. Laisserions-nous les hyènes prendre possession de notre terre sans la défendre ? s'indigna Namiri en se levant, une expression répugniée repeignant son visage. Et nous ? Que deviendrions-nous ? (Elle se mit à faire les cent pas.) Nous nous installerions sur le territoire de notre hôte, et ce pour le reste de notre avenir ? L'embarras grandit en nos coeurs, mon roi. Plus le temps passe et plus nous avons l'impression d'abuser de l'hospitalité du peuple des Terres Libres.

Elle adressa un regard désolée à son roi, les oreilles et la queue basse, immobilisant un instant sa marche. Mille émotions bouillonnaient sous sa poitrine et elle ne savait plus à laquelle donner libre cours. Sans laisser à Azaan le temps de lui répondre, elle inspira et poursuivit son discours.

– Lorsque nous sommes arrivés ici, nous n'avions rien d'autre en tête que de survivre et nous remettre de nos pertes et de nos blessures. Ceux qui étaient les plus malenpoints ont pratiquement tous recouvert et Harati est la dernière dont nous aurons à déplorer le départ. Notre deuil fait, nous avons attendu votre décision concernant la suite des événements, mais depuis le départ des Gardiens, plus aucune nouvelle ne nous est parvenue. Nous nous sommes peu à peu laissés gagner par une oisiveté et un silence qui nous empate l'âme et entartre le prestige de notre clan. Aujourd'hui nous ne savons plus exactement qui nous sommes ni ce que nous allons devenir. Azaan, de qui êtes-vous le roi ? Et de quel royaume...?

Soudain, Namiri se pétrifia de honte. Elle baissa la tête et se tassa de nouveau. Elle venait de s'apercevoir du ton et des mots qu'elle avait employé pour parler à son roi, son aîné qui plus est. Elle ferma les paupières s'inclina encore, son menton rasant le sol.

– Je vous prie d'accepter mes excuses. Je n'aurais pas dû m'exprimer de la sorte. Cela ne se reproduira pas. »

Les paroles de la lionne furent difficiles à entendre mais Azaan ne laissa pas d'émotions négative transparaître sur son visage. Pourtant, en l'entendant, il se doutait bien qu'il avait échoué en tant que roi mais aussi comme leader de Prideland. Son clan se sentait délaissé et prenais la non action de son monarque comme un signe que celui-ci n'agissait pas pour eux. Il en fut blessé. Mais il ne laissa pas tout ceci le submerger. Alors que la lionne en face de lui crachait ce qu'elle avait sur le coeur, faisant les cent pas, il se contenta de la regarder et de l'écouter. Elle finit par s'excuser de lui avoir parler de la sorte. Mais à vrai dire, peut-être était-ce la meilleure chose qu'elle puisse faire.

" Ne t'excuse pas. "

Dit-il d'un air étonnement froid. Lui qui était toujours souriant en cet instant était très sérieux et rien ne se dessinerait d'autre sur ses babines que cet air distant.

" Je comprend votre frustration, je la partage également. Ce n'est pas un secret que je vieillis et je crains de ne jamais pouvoir rentrer. Alors si je pouvais accélérer plus les choses, je le ferais. Mon coeur appartient à Prideland et ce depuis le jour de ma naissance, rien n'a changé."

Azaan était lui aussi très attaché à ses terres d'origines. Même si sa mère venait d'une autre contré, il se sentait totalement appartenir à Prideland comme si tous ses ancêtres y avaient vécus. Ce n'était probablement pas le cas de Avha, qui elle avait toujours été plus aventureuse. Mais pour lui, ne pas avoir pu voir sa fille naître au rocher avait déjà été un déchirement.

" Kama et moi-même avons envoyez de nouveaux tributs aux gardiens afin de leur venir en aide et je crois savoir que des Mositus sont actuellement entrain d'enquêter avec eux. Par ailleurs, certains de nos guerriers sont déjà sur nos terres afin de veiller à ce que personne ne s'en empare. Jusque là, aucun autre clan n'est venu sur Prideland. "

Il se sentait si impuissant finalement. Le roi ne pouvait que donner des directives, mais il n'était qu'un vieux lion pour qui les mois et les années étaient dés à présent comptés. Alors que pouvait-il bien faire de plus que d'attendre maintenant qu'il avait donné ses ordres ? Il comprenait que son clan soit en colère, mais il ne pouvait les rapatrier sur Prideland si il n'y avait pas de quoi manger pour eux. Les soldats avaient rapportés à quel point il était difficile de se nourrir convenablement sur leur sol. Non pas que la cendre ai tout ravagé mais surtout parce que les troupeaux n'étaient plus là.

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La lionne resta silencieuse. Elle avait cessé ses déambulations erratiques et, docilement, s'était de nouveau assise. Son visage était tourné vers Azaan, dans une expression que les brûlures rendaient à peine déchiffrable. Ces mots firent à nouveau écho dans sa tête.

"Mon coeur appartient à Prideland et ce depuis le jour de ma naissance, rien n'a changé."

Ce fut seulement à cet instant que Namiri se rendit compte à quel point sa crinière avait terni. Elle ne vit alors plus un monarque. Elle vit au delà de cela. Un lion comme les autres, en proie aux mêmes angoisses et bien plus encore. Il croulait sous l'inquiétude et le poids des responsabilités que lui conférait son titre, des responsabilités qu'il ne pouvait assumer seul. Toute sa frustration fut alors balayé par une immense vague d'admiration, de redevance et de respect.

Namiri se mordit la langue. Elle avait laissé son orgueil prendre le dessus et ne lui avait rien enseigné d'autre que ce qu'il savait déjà. Le répéter n'avait fait que raviver la douleur de son impuissance face à la situation.
Ce n'était certainement pas à elle de lui faire la leçon, et encore moins de lui dicter quoi faire. Elle aurait peut-être eu son mot à dire en tant que conseillère, mais conseillère elle n'était pas et conseillère elle ne serait jamais. Namiri était faite pour être en première ligne de front.

« Puis-je y aller ? demanda-t-elle subitement.

Elle ne savait pas exactement pourquoi elle avait dit cela et s'étonna elle-même de l'imprécision de sa question. Voyant Azaan ciller, elle ajouta :

– Je, hum. Ce que je veux dire, c'est que je veux me rendre utile. Je pourrais rejoindre les autres à la défense de Prideland pour prévenir de l'envahissement d'autres clans. Je peut participer à l'enquête. Ou m'adresser aux troupeaux. Donnez moi un ordre : je l'exécuterai. »

Dans sa bouche, ces derniers mots résonnèrent comme une supplication.

La femelle meurtrie avait arrêté de faire les cents pas pour regarder Azaan et elle vit son attitude totalement changer. Elle n'avait plus l'air d'être dans le reproche mais plus dans la compréhension. Le roi avait une sorte de don pour calmer les choses et pour faire comprendre son point de vue sans tracas aux autres lions, surtout ceux de son clan. Il en était fier et s'était surement ce qui faisait de lui un monarque correct. Probablement bon, mais il n'était pas assez imbu de lui-même que pour ne serait-ce qu'y penser.

Namiri demanda alors à rejoindre les guerriers qui étaient sur Prideland actuellement. Mais le roi n'afficha pas une mine très réjouie. La femelle avait été grièvement blessée et il voyait que les marques qu'elle portait ne l'aiderait pas à être la même guerrière qu'elle l'avait été. Il craignait qu'elle ne se mette en danger, mais pouvait-il réellement l'en empêcher ? Bien sûr, il pouvait lui ordonner de rester. Mais ce n'était la relation qu'il voulait avoir avec son peuple.

" Namiri ... Vous n'avez pas fini votre convalescence, je préférerais que vous receviez les soins dont vous avez besoin avant de reprendre du service. "

Il était inquiet.

" Ne m'en voulez pas, mais vous serez plus efficace si vous terminez de recevoir l'aide de Kuzaidia jusqu'au bout. "

Mais il sentait son désir d'aider et il ne voulait pas la laisser de coté.

" Cependant, j'aurais peut-être une mission pour vous. Je me fais vieux ... Et j'ai du mal à effectuer le chemin jusqu'à nos frontières pour prendre des nouvelles de nos guerriers. Seriez vous en mesure de le faire à ma place ? Nous nous retrouvons au bord de l'eau toutes les pleines lunes. "

Il espérait qu'en lui donnant ce travail de messager, elle pourrait au moins ressentir un peu la joie que de retrouver les autres guerriers et donc un peu avec Prideland. Malgré ses blessures, elle pourrait faire ce long chemin. Ce qu'il voulait, c'est qu'elle ne soit pas blessée actuellement car sa peau ne le supporterait pas bien du tout. Affaiblie et à nu, elle se ferait très vite abîmer et la douleur serait surement énorme.

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« Cependant, j'aurais peut-être une mission pour vous. Je me fais vieux ... Et j'ai du mal à effectuer le chemin jusqu'à nos frontières pour prendre des nouvelles de nos guerriers. Seriez vous en mesure de le faire à ma place ? Nous nous retrouvons au bord de l'eau toutes les pleines lunes.

Namiri releva la tête et les oreilles. Ces mots lui rendirent un peu de jeunesse. Fini l'oisiveté, l'attente et la paresse ! En acceptant, elle allait enfin pouvoir servir son clan et son roi comme elle se devait de le faire. C'était une mission simple qui n'avait en théorie rien de dangereux et cela lui permettrai de se mettre à nouveau son corps à l'épreuve des voyages et de mieux connaître les limites que lui imposaient ses blessures.
Namiri hocha la tête avec droiture prestance.

– Ne vous fatiguez plus, mon roi. À partir d'aujourd'hui et jusqu'à ce que vous ordonniez qu'il en soit autrement, je prendrai la relève et irai au point à chaque pleine lune.

Elle avait dit cela avec une assurance nouvelle et une mine renouvelée, plus solide et serviable que jamais. Cependant, après queslques secondes de flottement, elle baissa un peu les yeux et la voix.

– Je, heum. Je vous remercie. Vous savez... Avec cette mission, vous me rendez plus service encore que je ne vous aide. Merci. Merci beaucoup.

Namiri eut soudainement envie de frapper sa tête contre un tronc d'arbre. Pourquoi ne s'était-elle pas contentée de lui dire merci normalement ? Le roi n'avait pas besoin de connaître l'étendue de ses émois. Il avait besoin de lions robustes et de confiance, pas de petites pisseuses à la larme facile. Elle se racla bruyamment la gorge et leva à nouveau le menton vers Azaan, à nouveau droite et fière.

– Enfin. Vous pouvez compter sur moi pour accomplir cette tâche. »

Le vieux roi aurait cru qu'une mission aussi dangereuse n'aurait pas plus à la lionne, qu'elle aurait insisté, mais contrairement à ses attentes, elle accepta et montra même très enjouée par cette tâche. Au final, tout ce que Namiri voulait, c'était être utile au peuple de Prideland, qu'importe ce qu'elle pouvait faire. Azaan lui sourit et inclina la tête en fermant quelques instant les yeux pour lui signifier qu'il était heureux qu'elle le prenne comme cela et répondre à ses remerciements. Voilà une nouvelle particulièrement réjouissante pour le mâle qui sentait chaque jour sa sagesse devenir plus grande. Il se félicitait de plus en plus de ce qu'il arrivait à faire pour son clan, même si il était loin d'être irréprochable.

" Nous nous verrons donc dans peu de temps, je vous transmettrai mes ordres pour nos troupes et vous leur donnerez à ton tour. "

Son sourire bienveillant lui donnait l'impression de rayonné.

" A présent, excusez-moi mais je vais me retirer, Kuzaidia a l'air fort occupée, je reviendrai demain pour la voir. Autant que je passe un peu de temps avec ma fille, tant que je le peux. "

Cette phrase traduisait la peur du roi de mourir. Enfin, ce n'était pas vraiment une peur, mais il savait que chaque instant devait être chéri si il ne voulait que ses proches regrettent son départ encore plus. La jeune princesse ne le comprenait pas encore, mais celle-ci perdrait son père bien plus vite que n'importe quel autre lionceau. Et si elle préfère pour l'instant aller jouer avec les autres jeunes, nulle doute qu'un jour, elle se dira qu'elle aurait dû profiter de la présence de son géniteur pour apprendre mais aussi partager de la tendresse.

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Namiri hocha gentiment la tête.
Elle pouvait percevoir l'inquiétude qu'il avait de mourir. Mourir en laissant une jeune famille, mourir loin de ses terres natales. Il avait encore tant de choses à faire, et si peu de temps pour les réaliser. Ce temps devait être mis à profit pour transmettre sa sagesse à ses héritiers. C'était son devoir, en tant que roi, en tant que père également. Si Namiri pouvait le décharger des tâches ingrates et de plus encore, elle le ferait.

« C'est entendu. Ma fidélité vous est pleinement acquise, majesté, à vous et à votre famille. Ce sera un plaisir de vous aider à nouveau si le besoin s'en fait ressentir. Au revoir. »

Il posa une dernière fois sur elle les rayons de son regard d'or, et acquiesçant, s'en alla à pas tranquilles. Namiri le regarda partir en silence, et lorsqu'il quitta son champ de vision, retourna sous l'acacia bruissant de silence.