Le soleil venait tout juste de se lever, et pourtant, j'étais déjà là, parfaitement réveillé, en train de faire des allers-retours devant une caverne qui semblait vide à première vue. Or, il ne fallait pas s'y tromper, ce n'était absolument pas le cas : Sihiri se trouvait dedans, et elle mettait bas. Et ... J'étais complètement perdu. Que faire ? D'un côté, je voulais l'aider, la soutenir, mais de l'autre, j'avais peur. De plus, elle me repoussait dès que j'osais poser une patte sur le sol rocheux de la grotte. Ne pouvant donc rien faire à part attendre, je m'occupais en montant la garde. Enfin, ce n'était pas comme si une once mal attentionnée allait débarquer d'un moment à l'autre.
Après quelque temps, mes pattes tremblaient d'excitation et n'en pouvant plus d'attendre, je me décidai à prévenir le clan de ce qu'il se passait. Le soleil avait pas mal grimpé dans le ciel, je ne risquais donc pas de réveiller des lève-tard, n'est-ce pas ? Parcourant le territoire d'un pas rapide, j'apostrophai quiconque croisait mon chemin. J'eus la satisfaction de constater que mes camarades semblaient ravis par la nouvelle, ce qui me donna assez d'énergie pour ne pas m'évanouir avec tous les efforts physiques que je faisais. Vraiment, courir comme ça n'était plus de mon âge !
Une fois ma mission accomplie, je retournai au mont-blanc pour reprendre ma position initiale. Cependant, à peine étais-je arrivé que des petits miaulements parvinrent à mes vieilles oreilles. Était-ce mes petits ? Le cœur battant, j'osai braver le danger et entrai doucement dans la caverne, portant une attention toute particulière aux endroits où je posais mes pattes afin de ne pas trébucher, tout en m'attendant à me faire renvoyer à tous moment. Mais cela n'arriva pas. Soudainement inquiet, je levai les yeux et vis ma compagne, Sihiri, couchée, dos à l'entrée.
Rhamze : “ Sihiri ? „
Un petit rire me répondit.
Sihiri : “ Approche donc, mon gros bêta. „
Le poids qui entravait mon cœur disparu d'un coup. Tout allait bien ! Heureux avant même d'avoir vu la tête de mes enfants, je me déplaçai rapidement, mais silencieusement, aux côtés de ma douce, un grand sourire sur les babines. Lorsque mes yeux dorés se posèrent sur les petites boules de poils lovées entre les pattes de Sihiri, toute ma virilité fondit d'un seul coup, laissant place à de l'excitation :
Rhamze : “ Ah ! Oh là là ! Qu'est-ce qu'ils sont mignons ! Oh, Sihiri, tu es sûr que ce sont bien les miens ? Ils sont trop beaux pour être vrais ! ET TOUT PETIT ! MINUSCULE ! Je n'ose pas les toucher, ils vont se casser ! „
Sihiri me répondit par un coup de tête joueur sur le front, avant de déposer une lèche sur le crâne blanc d'un des petits, les yeux brillants.
Sihiri : “ Il y a une femelle et deux mâles. Comme la petite ressemble à une boule-de-neige, je l'ai appelée "Yuki", qu'en penses-tu ? „
Le cœur prêt à déborder de tendresse, j'acquiesçai en guise de réponse, avant de me coucher en face de mon âme-sœur afin d'avoir le visage au niveau de ceux de mes enfants. Ils étaient vraiment parfaits à mes yeux de vieillards. Si jeunes, si fragiles ...
Sihiri : “ Je t'ai laissé l'honneur de nommer les deux mâles ! „
Mes yeux se focalisèrent alors sur les deux lionceaux. L'un était minuscule - allait-il survivre ? - et l'autre paraissait vraiment grand à côté. Toutefois, j'étais décidé à ne donner que des noms mélioratifs à mes enfants. Hors de question d'avoir des Asilis dans ma famille ! Et puis, quelle idée de nommer son petit comme ça ! Je déposai alors mon museau sur le front du géant, qui tressaillit.
Rhamze : “ Toi, tu seras Fikra, le génie. J'espère que tu auras hérité de l'intelligence de ta mère et que tu n'auras pas pris de moi sur ce plan-là ! „
Ensuite, je reportais mon attention sur la petite boule qui se trouvait presque engloutie dans la masse de poils de sa fratrie. Les traits de son visage me semblaient encore plus fins que ceux de sa sœur, lui donnant un air un peu efféminé.
Rhamze : “ Et toi, tu seras Saikhan, car je peux déjà voir que tu seras un beau lion. „
Achevai-je finalement, avant de reporter mon regard vers Sihiri, qui me sourit. Ah, vraiment, mon bonheur était tel que je pouvais bien rejoindre le Grand Esprit à ce moment-même sans regretter ma vie, qui n'avait été qu'une suite d'échecs jusque-là. Trop heureux de cet événement qui marquait un nouveau cap dans mon existence, je sortis en trombe de la caverne, le sourire jusqu'aux oreilles. Des lions, qui avaient dû venir là en entendant la nouvelle, tournèrent des yeux curieux vers moi.
Rhamze : “ Ils sont là ! Nos petits ! Trois petits ! Fikra, Yuki et Saikhan, c'est leurs noms ! Je compte sur vous pour veiller sur eux tout au long de leur vie ! „
Et j'espérais pour eux qu'elle serait longue.
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