Elle était à nouveau seule. Seule pour chasser. Elle avait bien proposée à sa mère de venir la rejoindre, mais cette dernière avait choisit la sieste au soleil plutôt que l'effort alors qu'elle n'avait pas faim. Vukia n'avait pas particulièrement faim. Cela ne tenait qu'à un petit creux dans l'estomac, sans grande envergure. C'était sans doute la raison pour laquelle elle avait décidé de ne chasser qu'une petite bestiole pour combler ce manque. A vrai dire, Vukia voulait surtout laisser ses pulsions agressives sortirent de son corps, à travers griffes et crocs dans de la chair et du sang. La chasse. Le meilleur remède pour calmer les nerfs. Et Vukia avait les nerfs à fleurs de peau. Pourtant, elle devrait se réjouir. Grâce à Kwadja, le clan allait retourner bientôt vers l'oasis ! Mais cette joie se partageait avec la peine de la lionne lorsque Siri était partit de son côté avec une part du clan... Pourquoi les choses avaient donc tournées ainsi ? "On ne pouvait rien contre la volonté des autres" disait Narafi. Certes, mais bon...

La Mositus était née dans l'oasis et ne l'avait jamais quitté jusqu'alors. Le monde extérieur lui était inconnu et elle repoussait tout étranger, tenant absolument à ce que les siens vivent en paix dans leur coin, sans déranger personne. Mais non, il avait fallu que les Jangowas s'en mêlent et voici le résultat. Vukia ne pourra retrouver la paix au fond d'elle même que lorsque ce problème sera résolu. En plus, chasser de jour n'était pas pratique pour elle. Son pelage était trop sombre, elle était repérée par les proies à des kilomètres. Dans la jungle, c'était différent, elle pouvait se cacher dans la luxuriante végétation, être à cinq millimètres d'une proie sans se faire remarquer. A vrai dire, il n'y avait plus qu'à cueillir.

Repérant un lièvre au loin qui ne l'avait pas encore vu, la lionne se tapie au sol le plus possible. Le soleil tapait cruellement sur sa sombre fourrure, ce qui lui donnait la migraine. Si les Mositus ne vivaient pas dans le désert, c'était bien parce qu'ils ne le pouvaient pas. Dans la jungle de l'oasis, ils étaient préservés. Mais ici comme ailleurs, c'était beaucoup trop découvert. La lionne souffrait de la canicule. Elle tentait néanmoins de se concentrer sur sa proie droit devant elle. Si elle pouvait au moins réussir sa prise, elle en serait comblée pour la journée. Ca serait au moins quelque chose de réussit aujourd'hui. Ces derniers temps, elle avait cette affreuse sensation de tout échouer. Ce n'était pas vrai bien sûr, mais cela pesait néanmoins sur elle. Et le départ de Siri ne cessait de la travailler.

Elle rampait. Son regard émeraude était ébloui par le soleil, elle devait plisser les yeux pour ne pas finir aveugle. Le lièvre devant elle grattait la terre, rongeait des brindilles, mais n'avait pas remarqué sa présence. Lorsqu'il dressa les oreilles, alerte, Vukia se figea immédiatement. Elle priait intérieurement qu'il ne la voit pas. Fort heureusement, il semblait lui même croire que c'était la chaleur qui lui jouait des tours et reprit son activité. La jeune Mositus reprit alors sa traque. Le plus silencieusement possible. C'était une de ses grandes qualités, la discrétion. Dans la jungle, entourée de végétation, il fallait savoir avancer sans faire le moindre bruit, sans frôler la moindre feuille qui pourrait alerter la proie.

Tout à coup, la lionne bondit. Le lièvre partit trop tard, prit de panique, dérapant sur la terre trop sèche. Vukia lui tomba dessus, toutes griffes dehors et lui brisa la nuque d'un coup de croc. C'était gagné ! La féline se redressa, tout de même satisfaite, puis saisit sa proie dans sa gueule avant de s'éloigner vers un endroit à l'abri du soleil. Son pelage était brûlant, elle étouffait sous ses poils. Elle retourna vers le Baobab en espérant ne pas y croiser grand monde. En voyant les silhouettes au loin, elle rebroussa rapidement chemin, ne voulant pas avoir affaire aux Pridelanders. Où était sa mère ? Elle ne parvenait pas à la retrouver à l'endroit où elle l'avait laissé faire sa sieste. Peut-être avait-elle décidé de partir chasser finalement.

Vukia, les crocs ensanglantés par sa proie, se mit à l'écart sous le feuillage protecteur de l'imposante arbre de la savane. Elle s'allongea et commença à satisfaire le goût de sa récompense.

La lionne passait des coups de langue râpeux sur la fourrure du lapin souillée par le sang des blessures mortelles infligées par la femelle. Le petit animal n'avait pas eut le temps de souffrir au moins. Un simple coup lui avait ôter la vie. Après avoir lécher le sang sur le pelage de sa proie, Vukia prit enfin la peine d'entamer la chair qu'elle déchira de ses canines acérées à souhait. Elle découpa, mâchonna, quelque peu dérangée par les poils de la bête qui grattaient le palais et la gorge. Vukia aurait pu passer un moment tranquille, à l'ombre du baobab, à l'écart de tout les autres, à manger sa prise, restaurer sa panse, avant de peut-être faire la sieste tout comme sa mère avait préféré le faire, cela dit, les choses se passaient rarement comme on le voulait.

Une odeur parvint rapidement aux narines de la féline qui stoppa immédiatement son activité. Une odeur à la fois inconnue et familière. Elle ne savait pas encore à qui appartenait cette effluve mais savait qu'elle n'allait pas tarder à le savoir. Cela se rapprochait. Vukia dressa les oreilles en avant, les pattes toujours refermées sur le lapin inerte et ensanglanté. Elle guettait. Bientôt, un léger bruit de pas se fit entendre. Qui qu'il soit, l'individu voulait apparemment ne pas être vu. Ses efforts furent vain car la lionne n'eut même pas besoin de bouger un poils pour le découvrir. L'intrus le fit de lui même en sortant de derrière une dune, pile devant le regard de la Mositu.

Vukia ouvrit grand les yeux devant cette apparition. Sur le coup, elle n'eut pas l'occasion de reconnaître le lion qu'elle avait en face d'elle. La simple audace d'intrusion de ce dernier suffit à la mettre hors d'elle. Vukia fronça les sourcils en fixant intensément le mâle devant elle. Ses pattes se détachèrent de sa proie qui n'avait soudainement plus d'importance pour elle et ses griffes sortit de leurs fourreaux. La lionne coucha les oreilles en arrière et hérissa l'échine, dévoilant ses crocs rouge de sang dans un grondement menaçant.

- Qui es-tu et que viens-tu faire ici ? rugit-elle, menaçante.

Vukia maintenait sa position. Pour le moment, elle restait sur la défensive. Elle voulait attendre d'en savoir plus sur l'individu devant elle avant de savoir s'il fallait le chasser ou non. Bien évidemment, si ce dernier tentait la moindre action d'attaque, alors la femelle n'hésitera pas une seule seconde à se jeter à sa gorge. Vukia le menaçait de sa position, elle cherchait à l'intimider, certes, mais aussi à montrer qu'elle ne se laisserait pas faire, qu'elle n'était pas comme le reste de son clan, qu'elle était loin d'être pacifiste et bien docile. Vukia était là pour protéger les siens et cet intrus pouvait être un éventuel danger pour eux. Elle ne prendrait aucun risque. Quitte à y laisser sa vie. Déjà que Siri était partit, le clan était encore plus faible. Il n'était pas question que quelqu'un de plus lui veuille du mal.

Les oreilles plaquées sur sa nuque, son regard d'émeraude braqué sur l'inconnu, la lionne ne cillait pas et exigea que l'individu se dévoile. Elle gardait les crocs à l'air libre, prêt à agir en cas de besoin, les griffes striaient le sol sec de la lande et son beau poils rougeâtre maintenait la colonne hérissée de la femelle. Pendant un instant, le lion semblait hésité. Mais finalement, il se décida à répondre à la féline :

« Je suis… Hawari…de la famille des Zabyties, et je viens des Outlands

Un nouveau grognement signifiait que la lionne prenait déjà mal cette première information. Et ce, bien qu'elle ne connaisse pas la famille dont parlait le lion. Elle fit quelques pas en avant, devançant sa proie morte et s'arrêta devant comme si elle protégeait ce bout de viande, bien qu'en réalité, c'était l'accès au baobab qu'elle défendait si farouchement. Le lion avait dès lors reculer face à elle qui gardait le silence, incitant le mâle à éclaircir davantage sa venue ici.

je viens juste prendre des nouvelles sur la cohabitation des Mositus avec les Pridelanders !!! »

A nouveau, la femelle ne trouvait pas cette réponse à son aise et rugit à nouveau :

- En quoi ça te regarde ?! Un Outlander n'a rien à faire ici !

Le lion reprit assurance et répliqua aussitôt face à la lionne :

« Je viens de la part de Massempo, souverain des Outlanders, il s’inquiète pour votre clan qui a dû partager le terrain avec les Pridelanders… Il m’envoie donc en éclaireur pour s’assurer ils ne vous causent pas trop de soucis…et d’après ce que je vois…

A vrai dire, Vukia ne connaissait pas les Outlanders, encore moins Massempo. Elle ne savait d'eux que ce que tout le monde savait d'eux. Leur réputation et tout ce qui allait avec. Alors se dire que ce clan s'inquiétait de la cohabitation des Mositus et des Pridelanders, autant dire que Vukia avait dû mal à l'avaler. Les Outlanders devraient s'occuper plutôt de leur affaire. A moins bien sur qu'il y ait des lions qui leur étaient chers au sein de ces clans. Le lion s'approcha alors de la femelle. Celle-ci se mit à fouetter l'air de sa queue. La tension montait, une flamme ardente brûlait dans son regard pourtant si beau.

vous avez l’air un peu sur les nerf… je n’irais pas jusqu’à douter de vos origines mais il s’avère anormal qu’une Mositus se mette dans tous ces états…et d’après ce que je vois, vous n’avez pas l’air d’apprécier de partager votre repas avec vos nouveaux voisins ».

Vukia était l'exception qui confirmait la règle. Très peu de Mositus lui ressemblait niveau caractère. Mais la lionne n'y pouvait rien. Elle tenait ça de l'éducation de sa mère qui lui avait toujours dit de se méfier de tout le monde. Quand elle était lionceau, sa mère ne cessait de lui dire de devenir grande et forte afin de pouvoir protéger son clan. Jadis, la vieille lionne était tout comme sa fille, mais à présent, elle était trop âgée pour tenir ce rôle de guerrier et de protecteur du clan. C'était à la jeune Vukia de reprendre le flambeau.

Le lion fut hélas trop près. Au bout d'un moment, la féline ne tint plus et un coup de griffes acérées imprévisible partit tout seul dans la figure du grand mâle. Son but là n'avait pas été de déclencher la bagarre, mais de lui faire tenir distance. Elle rugit, elle l'incitait à rester à l'écart et à ne pas s'approcher d'elle. Elle fusillait le lion d'un regard meurtrier. Elle était bien décidée à lui faire comprendre que ce n'était pas parce qu'elle était jeune qu'elle ne savait pas se battre et encore moins tenir tête à un lion tel que lui.

- Cette cohabitation forcée ne tardera pas à prendre fin ! gronda la femelle, alors tu perds ton temps et ton roi s'inquiète pour rien ! Retournes chez toi à présent !

Vukia n'avait pas vraiment contrôlé le coup de griffe qui était partit. C'était une sorte de réflexe défensif. Le lion n'avait qu'à s'en prendre à lui même car jamais la lionne ne l'aurait frappé de la sorte s'il n'avait pas agit ainsi. Bon, évidemment, il ne pouvait pas le savoir. Disons que maintenant, il était prévenu. Vukia ne relâchait pas sa vigilance pour autant. On ne savait jamais, des fois que le lion voulait se venger et passer à l'attaque à son tour. Elle pivota vers lui alors qu'il se relevait, laissant une trace de sang sur le sol. On pouvait se demander si ces cicatrices partiraient ou non. La lionne restait sur ses gardes, sa queue toujours battante pour faire comprendre au mâle qu'elle n'aurait aucun scrupule à recommencer si nécessaire. Vukia n'était pas quelqu'un de très bavard. Elle communiquait beaucoup avec le corps, surtout dans ce genre de moment. Mais le lion reprit calmement :

« Au moins les Mositus ont bien choisi leur gardien, pas étonnant qu’aucun Pridelanders n’ose toucher aux Mositus… Ils devraient plus avoir peur de toi que des Nyeusis… Et bien dans ce cas…ma mission est terminée… je constate maintenant que les Mositus ont enfin un vrai guerrier capable de faire ses preuves…dans ce cas je m’en vais… »

Vukia ne disait toujours rien. Ses iris agressives ne lâchait pas le lion du regard. Elle le suivait dans ses mouvements alors qu'il faisait demi tour et le suivrait ainsi jusqu'à ce qu'il disparaisse de son champ de vision. Vukia cessa d'agiter la queue. Seul la touffe à son extrémité restait en mouvement constant. Finalement, le mâle s'arrêta avant d'ajouter :

« Au fait….si tu me permets…même si tu me refais l’autre côté du portrait, j’aimerais juste prendre des nouvelles de ma famille avant de partir… si ils ne se sont pas fait bouffer par les Prides ou d’autres monstres dans le genre »

Il regarda à nouveau la Mositus avant de rendre faire le tour du baobab, mais Vukia s'interposa dangereusement sur son chemin et lui ordonna de s'arrêter d'un rugissement. Non, elle ne permettait pas.

- Ta famille ? gronda t-elle, de quoi parles-tu ?

Il parlait d'un risque que sa famille se soit fait attaqué par les Pridelanders. Insinuerait-il qu'elle faisait donc partie des Mositus ? Impossible ! Ce lion n'avait rien d'un Mositu, il en avait même pas la couleur. Pensait-il pouvoir la berner ? Vukia ne comptait pas le laisser passer aussi facilement et surtout sur des paroles aussi peu explicite. S'il voulait vraiment passer et s'il était vraiment sincère, alors il faudra qu'il le prouve ! La lionne plissa le regard, attendant sa réponse. Ses griffes étaient toujours dehors et ses muscles étaient si tendus, prêt à bondir, qu'on pouvait déjà les voir rouler sous son épiderme.

« Si tu veux vraiment savoir mes réelles attentions, promet moi de n’en parler à personne, j’ai déjà risqué ma vie pour en arriver là…je n’ai pas envie de m’attirer plus d’ennuis… »

Vukia fronça davantage les sourcils. Comment pouvait-il se permettre de lui demander ça ? C'était lui qui était venu ici aux risques d'avoir des ennuis. Pensait-il vraiment pouvoir passer au baobab sans conséquence ? A son attitude, cela se voyait qu'il ne s'était pas du tout attendu à devoir passer sur le corps d'une Mositu pour aller au baobab, et qui plus est, une lionne coriace. Personnellement, Vukia s'en moquait du reste, du moment que le lion n'était pas là pour faire du mal aux Mositus. Après, les Pridelanders, c'était pas ses affaires. Silencieuse, Vukia le laissa donc poursuivre.

« Ce que tu as en face de toi ressemble peut être à un Pridelander…mais il n’en reste que l’aspect physique… ma famille a jadis été bannie des Pridelanders pour avoir aidé un Hors la loi en détresse… ils en ont payé le prix fort avec ces abominables lois de ces êtres sans cœur…ils ont été accueilli par les vôtres qui eux les ont aidé au moins… je suis né par la suite dans votre clan et j’ai grandi avec vous…j’ai quitté l’Oasis quelques années pour des raisons personnelles…. Mais je me sentais coupable de vous avoir abandonné au moment où les Jangowas était entré en conflits avec vous… je n’étais pas encore préparé pour vous aider…alors je me suis enrôlé dans les Outlanders pour avoir d’avantage d’expérience en matière de combat… »

Décontenancée, ça elle l'était. Bien qu'elle n'avait aucune certitude qu'il dise la vérité, elle sentait néanmoins le ton de la sincérité dans sa voix. Un lourd silence pesait alors sur les deux félins qui se faisaient face. Vukia considéra un moment le mâle de ses prunelles verdoyantes. Maintenant qu'elle y repensait, elle se souvint finalement d'un petit groupe de lions qui n'étaient pas Mositus et qui était arrivé à l'oasis. C'était ce que sa mère lui avait raconté quand la jeune lionne n'était pas encore née quand ils sont arrivés. Vukia était venu au monde environ un an après le lion qu'elle avait devant elle. Pas étonnant qu'elle ai du mal à se souvenir de lui. Mais en le scrutant en détail, il se pourrait bien que tout cela soit vrai. Quand à lui, personne ne pouvait lui reprocher de ne pas reconnaître la jeune femelle. Elle qui, lionceau, était adorable et espiègle, avait perdu l'innocence de l'enfance en grandissant et était devenue méconnaissable.


Un peu confuse, Vukia le cachait au mieux et renouvela son attention lorsque le lion reprit :

« Je suis revenu voir votre clan Parseque je savais que vous avez encore besoin de moi…mais cette fois ci je suis prêt pour vous aider. Les Pridelanders ont exilé mes proches car ils étaient jaloux d’avoir une famille qui aidait les autres en détresse…maintenant les voilà demandant l’exile au seul clan qui prenait soin des autres… ne trouve tu pas cela trop facile de te faire aider par celui que jadis tu as banni pour avoir pris soins des autres ? C’est en cette injustice que je me bats actuellement…ils ont brisé ma famille, maintenant je ne veux pas qu’ils vous brisent à votre tour… »

Il afficha alors un sourire :

« Toi au moins tu as déjà compris la menace qui t’attendait… même sans le savoir, tes réflexes se sont manifesté à la vue du Pridelander que j’aurais pu être… et j’en suis comblé… les autres Mositus devraient être tous comme toi, ma sœur !».

- Je ne suis pas ta soeur ! répliqua la femelle aussitôt, même si tu as vécu parmi nous, tu n'es pas pour autant l'un des nôtres ! Sinon, tu ne serais pas parti en abandonnant le clan qui t'a recueillit face au danger. C'est une preuve suffisante. Les vrais Mositus ne se quittent pas !

Elle repensa à Siri en disant cela. Comment avait-il oser partir ainsi ? Voilà donc comment un soi disant chef Mositus se comportait ? C'était une raison de plus pour élire Kwadja à sa place. En parlant d'elle, Vukia regarda à nouveau le lion et ajouta :

- Que tu reviennes, ou non, cela n'est pas à moi d'en décider.

Elle marqua un temps de pause avant de poursuivre :

- Soit, va voir ta famille, mais je t'ai à l'oeil !

Sous entendu, qu'elle ne le lâchera pas d'une griffe. Vukia avait malgré tout décidé de le traiter en simple Outlander, avec juste le bénéfice du doute planant sur lui.

La queue de Vukia se balançait désormais lentement de droite à gauche, ondulant gracieusement derrière elle. La lionne en elle même avait perdu son allure courbé et prête à l'attaque, s'étant redressé afin de dominer le mâle. Ou du moins, de le paraître car elle pourrait se mettre sur toute sa hauteur, le plus possible, elle ne pourra jamais le dépasser en taille. Mais la Mositu savait que la taille ne faisait pas tout. Elle comptait sur sa force et sa hargne pour sortir victorieuse de n'importe quel combat. Des fois ça marchait, et des fois non. Elle n'avait pas pu faire face aux Jangowas pour défendre son Oasis bien aimé. Mais d'un autre côté, une seule guerrière contre un clan entier... Enfin, deux si on comptait Narafi. Et puis il y avait quelques autres Mositus qui avaient tenté de tenir tête. Mais bref. C'était perdu d'avance. Elle l'avait su et avait donc préféré mettre de côté son principe de "mourir pour les siens" justement pour rester près d'eux et les soutenir dans l'épreuve de l'exil.

Bref ! Vukia décida de laisser planer le doute sur le mâle. Elle lui autorisa la visite à sa famille, et céda le passage, s'écartant d'un pas sur le côté. Le dénommé Harawi la remercia d'un signe de tête avant de poursuivre son chemin. Vukia n'avait pas l'intention de le laisser seul cependant. Elle resta près de lui. Enfin, pas coller à lui non plus, elle maintenait une certaine distance, ce qu'elle jugea nécessaire pour avoir le temps d'agir en conséquence, derrière lui. Aux yeux des autres lions de clans, elle ne donnait pas trop l'impression de l'avoir prit en filature. Mais ceux qui connaissaient la lionne et avaient repérer l'étranger, se doutait bien de ce qu'il en était vraiment. Vukia marchait tranquillement en suivant l'allure du lion, jetant des regards vers les siens mais ignorant tout bonnement les Pridelanders. Elle ne les regardait ou alors d'un mauvais regard. Lorsque Vukia vit le lion s'arrêter non loin d'elle, elle en fit de même. Il semblait avoir trouver ce qu'il cherchait. La femelle n'avança alors pas plus, respectant l'intimité des retrouvailles et se contenta de s'asseoir là où elle était.

Narafi, contrairement à sa fille, ne cachait pas ses sentiments, et certainement pas celui d'être ravi de revoir un lion qu'elle avait jadis connu, même un peu. Si la vieille lionne était aujourd'hui aussi compatissante et sage que tout autre Mositu, elle l'avait été dans le temps aussi. A l'inverse de Vukia, Narafi avait su gérer son rôle de guerrière et de lionne de paix en même temps. Sa fille avait encore beaucoup à apprendre pour savoir mettre sa hargne et sa méfiance de côté quand il le fallait. Cela viendra avec le temps. Du moins, la vieille Mositu l'espérait. Elle, avait toujours été calme et imperturbable, même quand il s'agissait de combattre et menacer. Pourquoi Vukia ne pouvait-elle pas en faire autant ? Serait-ce à cause de son père qu'elle ne connaissait pas ? Pourtant la jeune femelle ne parlait jamais de lui, et n'avait jamais cité que le fait de ne pas connaître son père la perturbait. Ah, s'il y avait bien une chose que Vukia savait faire à la perfection, autre que de se battre, c'était bien de cacher ce qu'elle avait dans le coeur ! Narafi remarqua alors le coup de griffe sanglant sur le visage du lion et jeta un bref regard à sa fille avant que celui ci ne dise :

« Narafi, cela faisait si longtemps pour moi, trop longtemps pour rester sans nouvelle de votre clan et de mes parents… Hélas, j’ai trouvé une nouvelle vie chez les Outlanders qui m’était plus appropriée…mais je n’ai pu résister au fait d’abandonner totalement ceux qui m’ont accueillis et élevés. »

Narafi étira un sourire lorsqu'il fit le lion baisser la tête. Elle s'approcha alors de lui, glissa son museau sous son menton pour lui faire relever la tête.

- Tu n'as pas à t’inquiéter, répondit-elle sous le regard d'une Vukia impassible, tu n'étais pas vraiment un Mositu, même si on pouvait vous considérer comme tel. Tu avais tout à fait le droit de partir et faire ta vie. Après tout, si ton existence actuelle te convient, c'est le plus important. Tes parents sont parfaitement bien ici. Tu vois, tout le monde y trouve son compte.

Harawi tourna alors son regard et croisa celui de la jeune lionne qui maintenait le silence. Le regard verdoyant de cette dernière était toujours aussi ardent quand il croisa celui du lion, mais le reste de son visage avait chassé l'agressivité et demeurait à présent parfaitement neutre.

« Au moins le clan a su choisir son ange gardien, félicitation pour cette incroyable force de la nature qui a su réagir comme il le fallait face au danger potentiel…je suis sûr qu’elle fera de grandes choses au sein de son camps. »

A nouveau, les flatteries, compliments et louanges n'engendrèrent aucune réaction particulière chez Vukia. Elle n'avait que faire de ce genre de chose, mais au moins, elle avait apaiser sa méfiance vis à vis de ce lion. Narafi s'assit face au mâle et répondit alors :

- Je pense l'espérer aussi. Mais la paix des nôtres restera toujours notre principale priorité. Et toi ? Que vas-tu faire à présent ? Retourner chez les Outlanders ?

Toujours simple spectatrice de la conversation entre le lion et sa mère, Vukia remarqua cependant que le mâle prit son temps pour répondre à la vieille lionne cette fois ci. Pourquoi ? Il était évident qu'il resterait dans son nouveau clan non ? Celui des Outlanders. A moins que sa venue ici n'est perturbé ce qu'il pensait être une évidence. Peut-être avait-il envie de retourner auprès de sa famille. Sa famille qui était désormais bien ancrée au sein des Mositus et n'avait pas l'air de vouloir en sortir. Même Vukia avait fini par les considérer comme tel. Mais pour Harawi, c'était une toute autre histoire. Après tout, c'était un Outlander.

« Je pense à un moment donné retourner dans mon clan, Massempo n’apprécierait pas qu’un de ses lions manque à l’appel, et de toute façon la situation actuelle est bien trop importante pour tout laisser tomber. IL y a encore du chemin à faire pour retrouver la prospérité des Outlanders, et d’autres évènements ne tarderont pas à se montrer, il faudra donc être prêt pour s’y confronter. Je serais toujours présent pour rétablir l’ordre et la justice en cette terre des lions. »

Narafi garda son sourire sage et répondit alors :

- Tu as à présent des responsabilité au sein de ton clan Outlanders. L'essentiel c'est que tu fasses ce que tu désires vraiment. Mais si jamais tu as envie de revoir ta famille parmi nous, sache que tu le peux.

Elle jeta un bref regard à sa fille, se disant que cette dernière avait à présent comprit le fait que Harawi n'était pas une menace pour le clan Mositu. Cela ne voulait pas dire que Vukia avait accordé sa confiance. Mais en tout cas, Harawi ne craindrait probablement plus pour sa vie à tenter de converser avec elle dans le but de voir les Mositus. Vukia avait oublié Harawi étant lionceau. Cela ne se reproduira pas une deuxième fois. Narafi regarda à nouveau les belles entailles ensanglantées qui parcouraient le visage du malheureux lion et s'approcha un peu pour mieux voir avant de demander :

- Est-ce que ça va aller ?

Et qu'allaient dire les autres du clan de Harawi en le voyant avec pareille balafre ? Allait-il être mal jugé pour s'être rendu chez les Mositus afin de voir sa famille ? Rien ne l'empêchait au pire de raconter une toute autre histoire.

« Ne t’inquiète pas, cela n’affectera pas ma santé physique, et puis, ça fait toujours bien de narrer ses mésaventures au sein du clan… au moins une chose est sure, avec ceci, les Outlanders n’oseront même pas poser une patte sur le territoire Mositus »

Ah qui sait ! Il fallait le voir pour le croire que les Mositus étaient capable de s'imposer de la sorte. Kwadja sera redonner une nouvelle opinion du clan aux autres, il fallait l'espérer, à l'inverse de Siri qui, en le quittant, ne donnait qu'une image de lâche. C'était ce que Vukia lui reprochait le plus. Mais après, elle était également triste que les Mositus se séparent. Tu parles d'un clan pacifiste et soudé !

- Oh je sais bien, fit la vieille lionne, tu m'as l'air assez costaud pour supporter bien plus que ça !

Après tout, quand Narafi avait connu Harawi, il était encore un lion bien jeune. C'était assez impressionnant parfois de voir comment les gens changeaient quand on ne les voyait plus pendant des années.

« Ta fille a une sacrée poigne, je l’admets… Je me demande bien de qui elle a hérité de cette force !! »

- Oh hum...fit la lionne, balayant le sol d'un geste de la queue, de moi probablement !

Elle sourit amusée. Elle avait mine de rien garder, ou plutôt gagner un peu de sens de l'humour. Il fallait bien qu'elle ai encore quelque chose pour elle malgré son grand âge ! La vieille lionne s'ébroua et ajouta par la suite :

- Ca m'a fait plaisir de te revoir en tout cas Harawi, prends soin de toi.

La vieille lionne finit ensuite par s'en aller, s'approchant de l'énorme tronc du baobab, suivit des yeux par Vukia qui reposa son regard sur le jeune mâle. La jeune lionne était resté silencieuse tout le long de la conversation et ne semblait pas prête à pointer le moindre mot supplémentaire. Ce n'était pas une bavarde après tout. La seule raison pour laquelle elle restait encore là, c'était encore et toujours pour surveiller l'intrus qui se trouvait là.

« Bon…et bien…il ne reste que nous deux… toi …et moi… »

C'était le moins qu'on puisse dire. Cela pourrait même rendre mal à l'aise de se retrouver seul avec une lionne aussi imprévisible que Vukia, surtout quand elle scrutait de son regard aussi impénétrable que les voix du Grand Esprit. Elle restait assise à sa place, la queue enroulée autour de ses pattes, le regard attentif, les oreilles dressées vers l'avant, ne lâchant pas le mâle du regard. Elle ne savait pas trop quoi ajouter à cette étrange rencontre à vrai dire. Cette lionne n'était pas de la meilleure des compagnies non plus, pas si on était autre chose qu'un Mositu.

« Et bien maintenant il est l’heure de rentrer chacun de nôtre coté…»

Il était tant qu'il rentre d'ailleurs, se disait sûrement la femelle. Même si elle se doutait qu'il reviendrait un jour pour revoir sa famille, comme l'avait si gentiment invité sa mère. Mais si ça se trouve, les Mositus auront d'ici là retrouver leur place à l'oasis. Il faudrait alors que le lion traverse le désert pour les retrouver. Soudain, le mâle s'approcha lentement de la femelle qui, toujours aussi farouche mais moins hargneuse, coucha les oreilles en arrière en le voyant arriver.

« Au fait, vous avez l’air un peu sur le nerf… je n’irais pas jusqu’à douter de tes origines mais il s’avère anormal qu’une chasseuse comme toi oublie de terminer son repas…et d’après ce que je vois, tu as l’air d’avoir oublié ton beau lapin que je crois avoir vu entre les pattes d’un Pridelander au loin... »

Ah oui c'est vrai le lapin...Bah, ce n'était pas bien grave. Elle ne l'avait pas jamais avec un très grand sérieux cette bestiole. Le seul inconvénient, c'est que ce soit un Pridelander qui ait mit la patte dessus.

- Je n'avais pas faim de toute manière, répliqua alors la lionne avant que le lion ne décampe devant elle, comme s'il craignait un coup de griffe.

Au moins, il avait retenu la leçon. Mais il y avait sans doute peu de chance pour que Vukia ne recommence un coup pareil, sauf vraiment s'il lui en donnait des raisons. Détalant à toute patte, le grand mâle s'exclama alors :

« Comme on me le disait souvent, qui va à la chasse, perd sa place !!! »

Il disparu très rapidement des environs. Vukia, qui n'avait pas bouger de sa place, le regarda s'éloigner en dressant les oreilles en avant. Le voilà qui était finalement partit, probablement rejoindre les siens. Quel drôle d'individu tout de même...