Citation :

Je me permets de m'incruster car ce RP sera le plus beau triste

Ni une, ni deux, je m’élançais au fond des dunes pour mettre un terme à mes promenades. La nouvelle se confirmait depuis quelques lunes et beaucoup se réjouissaient de revoir les lions qui avaient au départ une couronne sur leur torse cambrant, bombé par fierté. Mais certains avaient des pensées pessimistes : et si quelque chose d’exécrable était arrivé aux félins exilés ? Les rassurer aurait était vain : qui savait ce que le Grand Désert prophétisait ? Moi-même, je n’avais pas de chance : les égayer et les éloigner de cette pensée maussade étaient impossible. Honte…

L’événement si attendu fut dévoilé, mais un dénommé Vako manquait à l’appel, ce qui ne loupa as de déclencher l’anxiété de sa famille, surtout de sa sœur. J’aurai aimé les épauler mais cette amertume me rappelait sans cesse Tsua … Ces pertes me sont toutes aussi familières, à mon grand désarroi. Sa disparition fut déclarée après le retard entamé au retour des adolescents dont la couronne fut bénie par le soleil, mais ne fut pas prouvée. Cette conclusion fut aussi vite mise à part, car le lionceau trépassé perçait l’ombre de l’astre divin, reposé sur une de ses dunes. Peu de Jangowas le remarquèrent, occupés à servir le Clan. Une lionne lui semblant familière se jeta à son cou, le comblant de cajoleries et de caresses, emboités par des ronronnements. S’en suivi par ses géniteurs, une réunion demeurait certes loin de mes pupilles mais roche de mon cœur qui se serra. Le visage neutre de Vako pendant son apparition fit place à un large sourire présent sur ces babines.

Mais même si ces moments d’embrassades ne furent pas coupés par Vako, le lion s’obligea à le faire pour se diriger vers le clan. Tous formaient une troupe pour attendre les requêtes, et certains dévisageaient ou bien simplement murmuraient. Les yeux fixaient la corpulence du Jangowas : mince, avec des cicatrices ornant sa silhouette. Des altercations et des discordes furent sans doute une épreuve à affronter pendant ce périple dangereux. Trophées de combats dont ils avaient suscité l’attention, l’admiration ou le son du silence pesant au beau milieu de la troupe. Plissant les yeux, je m’avançais, perçant la cohorte formée à demi-lune de Vako avant de m’installer à la hauteur des Jangowas. Des prunelles se concentraient sur mes éloquences futures, je ne devais pas valser avec l’échec maintenant. L’ambition de Vako à être autocrate s’était faîte entendre et cela causa les moqueries de ses supérieurs à son jeune âge, mais cette utopie aujourd’hui allait bientôt se réaliser. Sans doute demain, le rang que l’on m’avait nommé ne sera soufflé comme l’étincelle de la lanterne. Avant de porter mon regard sur la rangée de droite et celle de gauche, mes yeux s’étayèrent sur Vako. Je m’approchai de sa silhouette un tantinet, pour faire entendre mon murmure suave.

« Il semblerait que tu verras ton rêve réalisé. Bonne chance. » lui lançais-je d’un susurrement accompagné d’une expression juste.

Il s'était fait discret. Personne ne l'avait vu. Personne ne l'avait prévenu. Mais il avait su. Peut-être était-ce son instinct, ou bien une simple intuition. Toujours était-il qu'Hatari était arrivé à temps. Au parfait moment. Lorsqu'il s'était rendu compte que cela faisait désormais presque une année qu'il avait quitté le désert, une vieille tradition avait resurgit, et il s'était rappelé que les jeunes partis en exil seraient de retour sous peu. Et parmi eux, il savait que certains - et plus particulièrement un - avait des vus sur la place d'Empereur. Or, son retour d'exil serait le parfait moment. Alors il était parti.

Il avait refait son chemin à l'envers, sans détours. Il avait traversé des territoires connus et inconnus, vu défiler le jour et la nuit sans guère y prêter attention. Il ne songeait qu'à arriver à temps, mais la route était longue. Et s'il savait parfaitement se repérer dans certains territoires, la tache se révélait plus ardu dans à certains passages, et plus encore dans l'obscurité. Cependant, quand enfin il aperçut le désert - après avoir remarqué que les températures se faisaient plus clémentes - il fut soulagé. Il n'avait pas croisé de lions en chemin, mais il espérait que tout ne s'était pas encore joué.

Cependant, même une fois dans le désert, son voyage n'était pas terminé. Il devait encore trouver où les Jangowas s'étaient installés, et le faire sans se faire remarquer. Autant dire que ce n'était pas gagné d'avance. Néanmoins, à force de persévérance, il parvînt à les localiser. Et si, après les avoirs observé, il n'était pas certain de reconnaître le futur prétendant - et donc de savoir s'il avait loupé le retour de ce dernier - Akili paradait toujours. Il n'avait donc rien loupé. Alors, Hatari se terra, et vécu dans l'ombre des Jangowas durant quelques jours. C'était compliqué, car le vent changeait sans cesse de direction, et il devait être plus que vigilant pour ne pas se faire voir. Mais il avait appris l'art de se faire discret.

Et enfin, un matin, un nouveau lion rejoignit le clan. Et si l'exilé ne pouvait rien entendre, il pouvait observer. Et quand le clan entier fit cercle autour d'Akili et du nouveau venu, alors il su que l'heure était arrivé. Et peut importe l'issue, il ne voulait pas manquer cela. Alors il s'approcha. Qu'importe, désormais, qu'il se fasse repérer. Il était libre de toute entrave. Et tandis que le combat faisait rage, le hors-la-loi observait son ancien clan. Il vit bien des connaissances, mais aucun sourire ne se dessina jamais sur ses babines. Un mur, rien qu'un masque impénétrable, et rien d'autre. Une légère brise soulevait sa crinière, emmenant avec lui des poignées de sable.

Et puis, après un duel sauvage, Akili se retrouva au sol, et le jeune mâle planta ses crocs dans le museau du vieil Empereur. Même d'où il était, Hatari apercevait les tâches sombres sur le sol. Désormais, même si le vainqueur ne lui donnait pas le coup de grâce, Akili mourrait. Ce serait la fin d'un règne, et le nouveau d'un autre. L'Empereur qui l'aurait banni ne serait plus. Mais cela ne changerait rien. Hatari ne renoncerait pas. Ce jeune mâle avait vaincu, et l'ancien Jangowa savait que ce n'était pas une mince affaire. Mais il lui avait par la même occasion volé sa vengeance. Ça, et l'occasion de tenir une nouvelle fois tête à Akili. De déchirer la moindre parcelle de son corps. De le ruiner.

D'un geste lent, Hatari se leva. Il avait parfaitement conscience qu'on pouvait l'apercevoir et le reconnaître sans mal. Il croisa même le regard de Léhona. Mais qu'importait ? Qu'ils viennent, ceux-là même qui l'avaient chassés sous les ordres d'Akili. Qu'ils viennent, et Hatari n'en épargnerait aucun. Ni mâle, ni parents, ni anciens compagnons. Aucun. Sauf peut-être le nouvel Empereur, s'il se révélait n'avoir aucun lien dans l'affaire. Mais l'exilé se doutait que le jeune mâle ne laisserait pas un hors-la-loi mettre son clan à terre. Qu'importe alors, il le tuerait aussi. Et ensuite, il partirait. Il n'avait nul désir de prendre la place d'Empereur du désert. Peut-être mourrait-il avant. Peut-être pas. Seul l'avenir le dirait. Alors, tournant le dos, le mâle s'engagea de nouveau dans les immensité du désert, solitaire.

Après un moment qui parut interminable au jeune mâle, Akili se leva, prêt à répondre au défi de son cadet. Il accorda quelques regards à la ronde – un pour Chenko, comme pour lui ordonner de rester sur le côté sans se mêler de l'affaire, un pour Léhona, son impératrice...
La phase d'intimidation, afin d'impressionner l'adversaire, commença alors. Ce fut un concert de grondement et de rugissements, assorti de quelques pas l'un autour de l'autre. C'était effectivement impressionnant, cependant cela n'intéressait guère Khassim. Enfin le véritable combat commença, lorsque l'actuel Empereur lança sa patte sur le prétendant, toutes griffes dehors, coup que Vako évita de justesse.

Alors s'enchaînèrent les coups, les ruses, les esquives et les cris de douleur.
C'était d'abord Vako qui s'élançait sur Akili, lequel repoussa sans difficulté son adversaire, puis Akili s'élançant sur Vako étendu sur le sol sablonneux... Un coup de griffes, une brève course en direction de l'adversaire, une morsure, une chute... Les coups s'enchaînaient sans aucun répit, comme une danse hypnotisante et létale, à laquelle participait l'audience de Jangowas en agrandissant ou en étrécissant le cercle qu'ils formaient selon les mouvements d'Akili et de Vako.
Khassim surveillait le combat, enregistrant les moindres faits et gestes des deux prétendants. En plus d'être passionnant par son issue, ce combat intéressait énormément le mâle aux yeux orange qui pouvait utiliser cette rare occasion d'un combat sans merci pour s'instruire. Il analysait les mouvements des deux combattants, se disant à part lui ce qu'il aurait fait à la place de tel ou tel, méditant la stratégie de l'un ou de l'autre.
Les yeux fixés sur le spectacle qui se déroulait devant lui, il ne prêtait aucune attention à ce qui se passait autour de lui. Il ne vit pas Léhona parler à Alibi, ni ce dernier être emporté loin de la bataille par son père, ni même ne sentit Hatari, l'exilé, quelque part dans son dos, venu également assister au combat.

Enfin, après quelques instants d'une rare violence, l'issue du combat se fit de plus en plus claire. Akili portait sur son pelage gris plusieurs blessures laissant largement passer le sang, tandis que Vako, plus fringuant et plus énergique, n'avait que quelques égratignures et un peu de sable sur la fourrure.
Après une violente – et très inattendue, étant dépourvue de la ruse habituelle du vieux lion – attaque de la part d'Akili, Vako se releva soudain, s'étant débarrassé du poids de son adversaire, et plongea sur l'Empereur sans lui laisser un seul instant de répit. Il planta ses crocs dans le visage du mâle gris, fermant sa gueule de force avec ses mâchoires.
Alors Khassim sut que c'était terminé. Akili se débattit quelques instants, mais en vain: il finit par cesser de bouger, préférant utiliser ce qu'il savait sans doute être ses derniers instants pour aspirer de l'air, chose qui lui était de plus en plus dur.

Le désespoir se peignait clairement sur le visage du mâle aux yeux émeraude: après tous ces mois à entendre Vako proclamer à tort et à travers ses ambitions, tous ces mois durant lesquels il s'était contenté de le regarder du coin de l’œil avec un regard malveillant, ils en arrivaient là. Le lionceau rêveur était en passe de réaliser son rêve, et Akili regrettait sûrement de n'avoir jamais pris le temps de s'occuper de ce problème avant.
Maintenant, il était trop tard. Tous les Jangowas retenaient leur souffle dans l'attente du coup de grâce.
Khassim s'autorisa à détacher un instant son regard des deux combattants au sol pour chercher son père des yeux. Chenko, au bord du cercle, les muscles crispés, ne pouvait qu'observer son ami, couvert de sang et de poussière, promis à une mort certaine. Si son fils était désolé pour le Général, il savait comme lui que personne n'y ferait rien. C'était la loi du Grand Désert, c'était ainsi qu'allait la vie.

Les deux lions, l'ancien et le nouvel empereur, restèrent encore une seconde dans leurs positions présentes, figés, quand soudain Vako se redressa. Lâchant le vieux lion de ses fortes mâchoires, il l'obligea à se remettre sur ses pattes malgré son état de grande faiblesse et son sang qui abreuvait le sable à chaque mouvement. Il était clair que sans le jeune Jangowa, jamais Akili n'aurait pu se relever, sans même parler de tenir debout: même s'il l'avait souhaité, il n'aurait pas pu se défendre.
Enfin, appuyé contre le mâle aux yeux verts pour le soutenir, Vako lança un regard à la ronde, sembla murmurer quelques mots à l'attention d'Akili et mit fin au combat. D'un grand coup de mâchoire vif et violent, il attrapa la gorge de son adversaire déjà vaincu et la sectionna.
Alors le corps flasque et sans vie d'Akili tomba au sol, presque sans bruit, tandis que déjà Vako ne lui accordait plus un regard.

La foule de Jangowas commençait à murmurer, murmure qui, Khassim le savait, allait bientôt éclater en chœur de félicitations et d'honneurs pour le nouveau dirigeant du Grand Désert.
Vako, digne et droit, était sur le point de lancer un profond rugissement lorsque s'éleva la voix de Chenko.

- Il y un intrus là-bas!

Khassim, aussitôt alerté, fit volte-face et scruta la direction indiquée par son père. Son sang ne fit qu'un tour lorsqu'il vit une pâle silhouette féline qui s'éloignait.
Il ne l'avait que très peu côtoyé lors de son enfance, cependant il aurait reconnu n'importe où l'odeur des Jangowas, bien qu'assez estompée par le temps et les vagabondages, et il avait beaucoup entendu parler de lui après son retour d'exil: Hatari, celui qui avait refusé le combat contre les Mositus, et qui avait été banni en conséquence.
Aussitôt la colère se mit à brûler en lui. Hatari avait voulu épargner ces hyènes de Mositus malgré tous leurs crimes, il n'avait jamais été un vrai Jangowa. Maintenant il osait revenir dans le Grand Désert, et pour assister à la mort d'Akili en plus, comme pour narguer l'ensemble du clan!
Sans perdre un instant, Khassim s'élança en grondant aux côtés de son père qui s'apprêtait déjà à courir à la suite d'Hatari. Malheureusement, les prémices de vengeance du mâle gris-brun furent stoppées nettes lorsque Vako rugit.

- Il suffit! Ce jour est symbole de changement! Que m'importe que cet intrus soit exilé ou voyageur, voyez comme il s'éloigne, il quitte déjà le territoire. Chenko, si tu es si inquiet, prends donc ces deux guerriers avec toi et pars t'assurer qu'il quitte bien nos terres. Mais si c'est bien le cas, ne t'avise pas de l'attaquer, il n'est pas de raison de ternir encore plus notre image!

Le lion des sables plus sombre s'arrêta brusquement et resta figé, choqué. Ne t'avise pas de l'attaquer? Ternir encore plus notre image?! Qu'est-ce que cela voulait dire? Hatari avait été banni après avoir trahi son clan, et Vako voulait le laisser s'enfuir comme ça, sans rien dire? Et que signifiait "ternir encore plus notre image"? Ce qui amoindrirait leur réputation, c'était la faiblesse dont ils faisaient preuve à l'instant en laissant partir un traître sans lever la griffe!
Khassim, furieux, ouvrit la gueule avec l'intention de répondre, mais croisa le regard de son père. Chenko, il le savait, était tout aussi outré que lui, mais il gardait son calme. Son fils perçut le message muet qu'il lui transmettait: on ne peut rien y faire. C'est l'Empereur, il faut obéir.
Malgré sa colère, Khassim reconnut la sagesse de cet avertissement. Maintenant que Vako était le nouveau dirigeant du Désert, il avait l'autorité suprême sur ses sujets, et l'attaquer, ne serait-ce que verbalement, serait extrêmement dangereux et coûteux au mâle aux yeux dorés. Aussi referma-t-il la gueule et baissa-t-il la tête, amer, avant de suivre son père.

Au moins s'assurerait-il qu'Hatari quitte leur territoire. Et il serait ô combien ravi de riposter si celui-ci tentait d'utiliser la violence...
Étouffant un léger grognement, Khassim se retourna, tournant le dos au nouvel Empereur recevant des félicitations afin de participer à l'expédition menée par Chenko. Il jeta un dernier regard derrière lui – que réservait l'avenir au clan Jangowa, après l'accession au pouvoir d'un lion qui semblait cruellement dépourvu de fermeté? Khassim allait devoir travailler encore plus dur au sein du clan s'il voulait pouvoir être accepté par Vako, une fois que son père se retirerait du poste de Général...
Mais le mâle était déterminé. Il avait été formé pour ce rôle, personne ne pouvait le tenir mieux que lui, il le savait. Il saurait le faire voir à l'Empereur, et à l'ensemble du clan.

Spoiler: