The King's comming back

C'est un matin comme les autres, on peut le dire. Un matin comme Déjem en vit depuis plus de deux ans à présent. La même matinée qui se répète sans cesse en boucle dans la vie du lion, seul le temps changeant parfois, en même temps que le lieu où il se trouve. Il se lève avant l'aube, réveille son fils, et part avant qu'une patrouille de Sharkan ne puisse les trouver. Depuis quand n'a-t-il pas profité d'une bonne nuit de sommeil, pendant laquelle il ne ruminait pas sa vengeance ou ne restait pas éveillé à guetter ? Lui même ne le sais plus. Tout simplement parce qu'il a cessé de compter les jours. Ce jour-ci ne fait pas exception à la règle, mis à part le fait qu'il ne se trouve plus sur le territoire de Freeland. Il ne sait pas jusqu'où ils ont marché, il sait que lui et Haki ont dû quitter le territoire, contraints de fuir plus loin encore après l'écrasante défaite des Pridelanders, et qu'ils sont épuisés. Il plante ses griffes dans la terre sèche dans une mimique frustrée... Même les Pridelanders ont été chassés de leur territoire... Sharkan a étendu sa tyrannie jusqu'aux autres territoires, qui sait jusqu'où il ira pour étancher sa soif de pouvoir ? Dans un mouvement de rage, Déjem donne un coup de patte dans une touffe d'herbe isolée, envoyant valser une motte de terre. Il doit à tout prix le stopper, récupérer son trône et remettre les choses en place ! Il ne peut pas laisser le grand mâle salir le nom des Freelanders, ce nom que lui et son père ont toujours porté fièrement.
Il respire à fond, tente de calmer sa colère. Toujours tendu, il rentre ses griffes, réveille sont fils, et part sous le ciel encore piqueté d'étoiles. Tous les muscles de son corps semblent s'être donné le même mot d'ordre : tension. Sa démarche, bien que rapide (il dépasse aisément son fils) se fait plus imposante, pour ne pas dire lourde. Il ne prête plus attention au jeune lion qui l'accompagne, se préoccupe peu de sa trajectoire, et tant pis s'il tombe sur un Nyeusi ! Il pourra au moins passez ses nerfs sur lui et se détendre un minimum. Il est étrangement silencieux, foulant le sol sans un bruit, pareil à un fantôme vengeur que l'on aurait placé sur cette terre. Le vent créé par son mouvement fait onduler son épaisse crinière, lui cachant la vue par moment.
Il n'a pas d'objectif, se déplace en errant, et ne fait pas attention à ce qui l'entoure. Ce défaut est tel que, lorsqu'il se décide enfin à se retourner, son fils a disparu. Est-ce Haki qui s'est perdu ? L'a perdu de vue ? Ou bien est-ce lui même qui s'est détourné du chemin que suivait son fils ? Il panique un court instant, ferme les yeux pour se calmer. Haki est grand, il sait se débrouiller seul et il saura le retrouver. Ce n'est pas la première fois que les deux lions se séparent. L'idée que ce soit un coup de Sharkan ou de l'un de ses sbires lui traverse l'esprit, ressort immédiatement. Jetant un dernier coup d'oeil à l'endroit où était censé se trouver le lion caramel, il reprend sa route, bifurquant légèrement et espérant retrouver son fils sur le trajet.
Bientôt, le paysage change, perd sa végétation, devient plus sec encore, comme châtié par le soleil et la flore. Lorsqu'un arbre apparaît, il est complètement desséché, mort depuis longtemps. Déjem ne met pas longtemps à reconnaître ce territoire maudit, dont personne ne veut hormis ceux qui ont été chassés de leurs terres. Il se tend... Ce territoire manque horriblement d'abri, le laisse trop à découvert... C'est une sensation horrible que de se sentir observé, épié comme une proie... Et ça, il ne le supporte pas... Il continue tout de même à avancer, essayant de se maîtriser pour masquer une angoisse qu'un roi ne devrait pas avoir.

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Bien qu'il se détende visiblement au fil de sa progression, Déjem garde cette légère tension, qu'il essaye en vain de cacher, due à la perte malencontreuse de son fils. Malencontreuse... C'est un terme qu'il utilise d'habitude avec ironie lorsqu'il parlait de sa descente du trône. Il espère cependant que personne ne le verra ainsi, vulnérable, pense-t-il, avec autant de vide autour de lui. En plus c'est sec, rien à voir avec les paysages auxquels il est habitué. Une voix s'élève derrière lui, tintée d'une légère méfiance qu'il a déjà entendue chez bon nombre de lions. Lions qui, pour certains, avaient sans doutes cru reconnaître le roi et s'étaient vu refroidir par Déjem et ses mensonges.

« Bonjour, excusez-moi de venir vous aborder de la sorte mais vous ne semblez pas rassuré seul ici, ça ne va pas ? »

Le grand mâle s'arrête, tourne lentement la tête vers l'inconnu qui vient de lui adresser la parole. Ses yeux verts l'examinent un moment... Un grand mâle, brun, ses yeux marrons tintés de cette légère méfiance qu'il a sentie dans sa voix... Rien de bien extraordinaire en somme. Mais il faut tout de même savoir se méfier des gens que l'on peut dire ordinaires et ça, Déjem l'a bien compris, depuis très longtemps. N'est-il pas lui même quelqu'un de "normal" tant qu'on ne connait pas son nom ? Il est trop loin pour sentir l'odeur de ce lion qui lui adresse la parole sans même le connaître, encore un point en plus pour mettre Déjem dans une mauvaise situation et lui intimer la prudence. Aussi, il fait apparaître un sourire sur son visage dur, qui se veut légèrement moqueur. Pas envers l'étranger, non, mais envers lui-même, histoire de baisser un peu la tension apparente entre les deux mâles. Il répond de sa voix grave, qu'il n'a adressée à personne depuis bien trop longtemps :

« Tout va bien, au contraire. Mais je n'aime pas les espaces dégagés comme ceux-ci. A vrai dire, je me demande comment vous faites pour être aussi détendu ! »

Il se doit de ravaler sa fierté, de passer le moins possible pour un haut gradé. Et pour cela, il tente de paraître aussi inoffensif qu'il peut l'être réellement. Il sait cependant qu'au moindre signe d'hostilité de la part du mâle brun qui se tient en face de lui, il n'hésitera pas à faire tomber le masque et à se défendre. Hors de question de détaler, le déshonneur serait trop grand. Il a déjà fuit une fois, il ne recommencerait pas... Déjem fini de se tourner complètement vers l'inconnu, histoire d'être un peu plus à l'aise pour lui parler, et reprend, sur le ton de l'interrogation cette fois et abandonnant son sourire :

« Dites-moi, je crains de ne m'être un peu perdu... Savez vous où nous nous trouvons ? »

Quitte à passer le moins possible pour un roi, autant en profiter pour poser des questions utiles (même si avouer s'être perdu n'est pas dans les habitudes du grand mâle). Il réfléchit aussi à toute vitesse à quoi répondre au brun s'il lui demande son nom, se crée une nouvelle identité en quatrième vitesse. Heureusement pour lui, il ne met pas longtemps à trouver : Yooku, voyageur solitaire. Ce n'est pas trop dur à retenir et une partie de cette identité n'est pas un mensonge. Déjem est bel et bien un voyageur, même s'il n'est pas totalement solitaire.

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L'autre lion se rapproche lentement de Déjem, afin que leur dialogue soit plus pratique. Ce geste, pourtant simple, a pour don de détendre un peu le grand mâle, de l'amener à jeter un autre regard sur son interlocuteur. Peut-être n'est-il pas un ennemi, peut-être même est-il un allié potentiel. Mais il n'est pas près à décliner son identité de si tôt, devant tout de même s'assurer un minimum de protection. Il reste sur ses gardes quant aux intentions de l'inconnu. Il l'écoute attentivement lorsqu'il répond à sa question concernant sa localisation actuelle.

« Nous sommes sur Outland, terre des Outlanders. Je ne connais pas vraiment ces lions mais ils ont été alliés des Nyeusis. Pour cette raison je vous recommande la prudence, comme vous semblez l’avoir depuis le début. »

Ses griffes sortent subitement et se plantent dans le sol à l'entente du nom des Nyeusis. Les fils de coyotes ! Eux qui l'ont chassé de sa terre, chassé les Pridelanders de leur territoire ! Il se trouve sur les terres de lions aussi malhonnêtes qu'eux, des exilés qui ne respectent aucun des principes établis dans les autres territoires. Il ne peut supporter l'idée de se trouver aussi près de ses ennemis sans pouvoir les voir, imaginant qu'eux pourraient l'épier facilement tellement ils connaissent leur territoire.
Pour la seconde fois de la journée, le Roi se force à respirer, à se calmer et à rentrer les griffes. Il remarque alors la visible tension du mâle alors qu'il évoque ces Nyeusis. Leur serait-il hostile lui aussi ? Déjem décide alors de changer de plan, ajoutant une nouvelle facette à sa fausse identité : partisan de la rébellion. Peut-être trouvera-t-il un allié en cette nouvelle connaissance et, plus on est entouré, mieux c'est. Lorsqu'il l'entend reprendre la parole, Déjem se recentre sur le lion brun, qui lui semble plus concentré sur le roi déchu...

« Je me nomme Sabaru et je réside provisoirement non loin d’ici. Il me semble connaitre votre odeur. Si vous chercher votre terre de résidence, il est possible que je puisse vous indiquer sa direction. »

Le roi affiche un sourire triste devant cet inconnu. Jouant le jeu jusqu'au bout, il se dévoile un peu plus que d'ordinaire, plus qu'il ne se dévoile à son propre fils, pour ne pas avoir l'air d'un roi. Sa terre ? Il ne peut la retrouver, pas pour le moment et ce malgré toute la volonté dont il fait preuve. C'est un peu de nostalgie dont il fait preuve depuis le début de son exil et qui lui est de plus en plus pesant. Il ne peut cependant en vouloir à Sabaru de réveiller cette vieille douleur, conscient que ce dernier ne pouvait pas savoir. Il roule un peu les épaules, dénouant ses muscles jusque là tendu tout en répondant :

« Mon nom à moi est Yooku et, malheureusement, mes terres m'ont été proscrites. Ce que j'appelle mon territoire est à présent occupé par un tyran que je ne peux voir, pas même de loin. »

Qu'il ne peut pas voir ? Non... En réalité, il crève d'envie de le retrouver, de mettre sa vengeance à exécution, de reprendre ce qui lui est du et de libérer ses sujet du joug de ce tyran. Il penche la tête vers Sabaru, le visage soudain sombre et plus du tout amusé ou même nostalgique. Il semble plus vieux, sérieux comme il l'est très rarement. Tout doute s'est envolé en lui et il voit à présent ce lion brun comme un allié qui pourrait lui être précieux, même s'il n'est pas encore prêt à lui céder son véritable nom. Peut-être plus tard. Il souhaite tout de même tester cette sûreté qui s'est installée au fond de lui (d'autre l'aurait dit trop prompt à céder sa confiance, trop naïf). Aussi, invente-t-il une histoire à servir au lion, aussi sérieux que si elle était vraie, entrant dans la peau du personnage qu'il s'est créé :

« De plus, une chose me tient en dehors de ce territoire : je me suis donné une mission. Déjem et Haki sont encore en vie, j'en suis sûr et certain ! Aussi, je souhaite les retrouver. »

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Un déclic semble s'effectuer dans l'esprit de l'inconnu, Déjem le voit bien dans ses yeux qui semblent tintés d'une légère méfiance à son égard. Et il ne faut pas longtemps à l'autre lion pour exprimer ce qui ne semble plus être un doute pour lui :

« Monsieur Yooku, vous seriez Freelander ? »

Déjem se contente d'incliner la tête, sans même dire un mot. Freelander, il l'était, et il l'est toujours, malgré son déplacement momentané. Il compte bien, en tout cas, revenir sur les terres de son enfance. Pendant un moment, il reste à regarder l'étranger, appréhendant la suite, se demandant si c'était une bonne idée de dévoiler son "plan" à ce lion dont il ne connait que le nom. Est-il vraiment quelqu'un de confiance ? Si ce lion n'était qu'un des sbires à la solde de Sharkan, assez habile pour le piéger ? Une méfiance mutuelle semble s'installer entre les deux lions, trop courte cependant pour peser sur la conscience de notre brun. Il a tôt fait, en effet, de redonner sa confiance à Sabaru.

« J’ai ma petite idée au vue de votre réaction à la prononciation des Nyeusis mais je vais tout de même vous demander une réponse : Il y a deux camps là-bas et je suppose que vous les connaissez, vous qui semblez lié à Freeland, l’odeur ne pouvant le nier. De qui êtes-vous le partisan réellement ? »

L'odeur ? Etait-ce donc une chose aussi futile qui l'avait trahi quand à son appartenance. Déjem retient un léger rire. Cette odeur particulière aux Freelanders, il pensait l'avoir perdue à force d'errance. Isolé des autres, il avait presque oublié comment elle était, plus sensible aux particularités dans la sienne ou celle d'Haki.
Il met un certain moment à répondre, évaluant l'autre mâle sans perdre son sérieux. Et lui ? De quel côté est-il ? Est-il intelligent de lui dire qui il est par la suite ou bien le mène-t-il en bateau depuis le début ? Le roi préfère tenter le coup, conscient des risques, et lui dévoiler dans quel camp il est.

« Je suis du côté de l'ancienne royauté. Il est inconcevable de laisser un tyran tel que Sharkan au pouvoir, qui sait ce qu'il peut encore faire comme dégâts ? Les lions de Freeland ont assez souffert comme cela. »

Il lance un regard suspicieux à l'autre lion. Le désignant du menton en relançant :

« Et vous ? De qui êtes vous donc le partisan ? Bien que je ne pense pas que vous soyez du côté des Nyeusis. »

Plus qu'à attendre la réponse du lion. Déjem était à présent décidé : bien qu'il sache mentir à la perfection (sûreté oblige), il n'aimait pas cela et comptait tomber le masque bientôt, dévoiler sa véritable identité à ce lion qu'il considérait déjà de confiance dès que ce dernier lui aura dit dans quel clan il était. Ces preuves de méfiances qu'il avait par moment n'étaient là que pour jouer au mieux son personnage car lui n'avait aucun doute. De plus, il se montrait assez étrange, changeant d'expression d'un coup, ne sachant pas se contrôler par moment et il était grand temps que son interlocuteur sache pourquoi, avant que ces sautes d'humeurs ne le déconcerte trop.

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Déjem croit guetter une certaine satisfaction dans le regard de son interlocuteur lorsqu'il lui annonce dans quel camp il se trouve. Peut-être n'est-ce qu'une illusion, peut-être qu'après tant de temps passé loin des autres lions, il ne sait plus interpréter certaines émotions. Il s'en souvient assez tout de même pour tenir son rôle, sans pour autant parvenir à éteindre cette rage qui se voit certainement dans son regard mais qui ne semble pas gêner le lion brun qui se tient devant lui. Au contraire, cela semble être la source de cette satisfaction qu'il croit voir.

« Si j’étais l’un des pions des lions noirs, supposez que vous seriez dans une bien mauvaise situation actuellement. Vous avez tout le profil d’un rebelle Freelander, Sharkan donnerait cher pour tenir entre ses griffes ne serait-ce qu’un seul Freelander ayant pris part au mouvement de résistance. »

Cette réponse lui arrache un sourire. La façon dont lui parle ce Sabaru lui plait bien, ce sera un allié précieux par la suite. Mais c'est surtout la suite de la phrase, qui fait réagir notre Déjem. Après tout, son interlocuteur ne peut pas savoir à quel point Sharkan rêve de l'avoir entre les pattes pour pouvoir le tuer proprement (ou pas) et se débarrasser de lui définitivement. Cela fait si longtemps qu'il fuit ce lion, et il est bien plus qu'un simple résistant : Il est le roi de l'ancien régime en quête de son trône que nombre de lions croient mort et enterré depuis longtemps, dont la vie même est remise en cause. Il se reprend assez vite, redressant légèrement la tête, réflexe un peu pompeux qu'il a acquis durant son règne.

« Et ce mouvement qui s’est crée parmi les Freelanders fuyards de Freeland, j’en suis l’un des responsables avec quelqu’un d’autre. On s’est tous enfuis après avoir fait échoué une mission Freelander, et maintenant on marche. On marche et on cherche…la même chose que vous monsieur Yooku. »

Le lion cesse de parler, semble hésiter un moment à continuer sa réponse. Déjem pose un regard intéressé sur lui, sachant être patient lorsqu'il le faut mais n'ayant tout de même pas toute la journée. Le fait qu'il soit à l'origine du retournement des Freelanders est le déclic qui lui indique qu'il peut à présent lui révéler son identité. Il sait malgré tout que le mâle brun n'a pas fini de parler et il le laisse terminer sa phrase. Haki lui revient en mémoire... Il est sûrement en sécurité, mais on est toujours mieux en groupe que tout seul, il faudrait qu'il le retrouve et vite... Ses sombres pensées sont stoppées par Sabaru qui reprend sa phrase :

« Mais vous, vous n’étiez pas là-bas. Pas dans les gorges, probablement pas dans les terres pendant que j’y vivais. D’où venez-vous ? Pour un opposant Freelander c’est plutôt singulier comme absence. Je ne suis pas un danger pour vous. N’ayez aucune crainte.. »

La réponse c'est qu'il ne pouvait pas y être, il a été bannis bien avant que ce Sabaru ne s'échappe et que la révolte ne commence. Malgré sa rancune tenace, il devait même avouer qu'il commençait à perdre espoir. A présent, il sait qu'il peut lui dire, lui révéler la vérité sur lui. Il redresse la tête, se grandit plus qu'il ne l'est déjà et avance d'un ou deux pas lents vers le mâle brun. Arrivé devant lui, il incline solennellement la tête et lui donne la réponse de sa voix grave.

« Vous n'avez pu me connaître car, en effet, je ne vivais déjà plus sur nos terres lorsque vous y étiez. J'ai été banni il y a longtemps, lorsque mon règne fut renversé par Sharkan. Celui que tout le monde cherche, celui dont les Nyeusis veulent la peau, c'est moi : Je suis Déjem, roi héritier de Freeland. »

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Sabaru semble surpris, et il y a de quoi. Il est celui dont les rumeurs colportent la mort, que Sharkan veut à tout prix voir mort afin d'éloigner le risque qu'il représente, à savoir celui qu'il revienne un jour pour reprendre ce qui lui est dû. Et c'est bien ce que le mâle brun compte faire. Son interlocuteur semble perdu dans ses réflexions pendant un court moment, évaluant peut-être la sincérité de ses propos. Il n'a cependant pas à douter et, si jamais il le fait, Déjem tentera de lui donner des preuve de la véracité de ce qu'il affirme.

« Je dois dire que… je n’attendais pas une telle identité de vous. »

Le roi sourit, comprenant parfaitement le brun qui se tient face à lui. Il est vrai que ce peut être difficile à croire, que ça peut paraître improbable de voir juste sous son museau celui que tant de monde recherche depuis maintenant presque deux ans. Les recherches des rebelles ont cependant finit par aboutir sur une bonne nouvelle. Le roi et le prince de Freeland sont en vie et sûrement bientôt de retour sur leurs terres s'ils ont leur soutient.

« Si vous saviez quels efforts on a mis en œuvre pour vous retrouver : Risquer sa peau, partir de Freeland, s’allier aux Pridelanders… Je commençais à douter que nos efforts paieraient un jour à vrai dire, c’était la course contre la montre. Enfin, le hasard fait parfois bien les choses. »

Déjem se contente d'acquiescer. Il ne connait que trop bien ce qu'à dû endurer le jeune lion. L'exil, la question que notre esprit retourne en boucle "Reverrons-nous un jour nos terres ?", l'idée que derrière chaque nouvelle rencontre peut se cacher un ennemi, la méfiance constante que l'on acquiert. Il lui est arrivé la même chose, même si c'était il y a bien longtemps. Sabaru semble se poser une nouvelle question, examinant le vide qui se trouve à côté de Déjem.

« Mais dîtes moi, où se trouve le prince ? Vous êtes tous les deux sain et saufs depuis ces dernières années, n’est-ce pas ? »

Déjem se tourne un moment pour regarder lui aussi le vide qui l'accompagne avant de se tourner vers le mâle brun pour lui répondre.

« Oui, Haki va bien lui aussi. Cependant, nous préférons nous séparer pendant le jour afin d'être moins repérable ou que l'un de nous deux puisse être encore en liberté à la fin de la journée si l'autre se fait attraper. »

Simple question de sûreté, même si, aujourd'hui, Haki avait dû prendre l'initiative tout seul. Et puis, ce n'était pas mentir au lion présent en face de lui, ils se séparaient bien pour ces raisons.

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Sabaru ne semble pas remarquer que le roi a plus perdu que laissé Haki seul. Les jeunes... Si difficiles à retenir, à comprendre... En même temps ce n'est pas si étonnant qu'il ait décidé de se faire la belle. En a-t-il assez de ces conditions de fugitifs ? Bien sûr ! Combien de fois le jeune mâle brun a-t-il demandé à son père de lâcher sa rancune, d'admettre la défaite et de recommencer à vivre normalement ? Trop de fois, mais ses mots ne semblent jamais vouloir rester longtemps dans la tête du roi déchu. Haki est sans doute trop jeune pour comprendre, mais se sont ses terres, son royaume et, par dessus tout, ses sujets qui souffrent du règne imposé de Sharkan.
Une question apparaît dans la tête de Déjem : Les alliés sont-ils tous réunis en un seul lieu ou errent-ils, tout comme lui, sur ces terres peu accueillantes ? Il faut en tout cas qu'il y ait de la mobilité, le mâle brun ne pourrait pas rester plus d'un jour ou deux au même endroit, vieille habitude de fuyard qui le poursuivra sans doute longtemps à présent. Sabaru semble réfléchir en face de lui avant de reprendre :

« Majesté, il faut que je vous explique les choses qui se sont passées de notre coté : Moi et un camarade Freelander sommes allés voir le roi de Prideland sur une Terre non loin d’ici. Il a été banni lui et son peuple de leur royaume par les nyeusis qui l’occupent actuellement, j'ignore si vous êtes au courant des dernières nouvelles. Ayant donc un ennemi commun nous nous sommes permis de prendre quelques décisions tous les deux, mais bien sûr vous reprendrez sous peu les commandes. »

Les griffes du roi en cavale se plantent dans la terre avant de se rétracter rapidement. Oui, il est au courant que ces chiens ont chassé un autre royaume de ses terres, qu'ils ont pris les commandes, une fois de plus, d'un territoire qui ne devrait pas leur appartenir. C'est d'ailleurs ce regrettable "incident" qui les ont forcés, Haki et lui, à quitter définitivement les terres de Freeland. Ces terres qu'il chérissait pourtant tellement. D'un côté, c'est une bonne nouvelle. Déjem se doutait déjà que Kumpa aurait sûrement été de son côté s'il lui avait demandé de l'aide (ce qui, de par sa fierté, est quasiment impossible), mais à présent qu'ils possèdent un ennemi commun, les deux rois ne peuvent que s'allier contre ce dernier.
Le terme "reprendre les commandes", marque un peu Déjem. Cela fait à présent un moment qu'il n'a rien dirigé en dehors des destinations que son fils et lui devait enprunter. Ce sera sûrement mieux pour lui de reprendre petit à petit son rôle de roi. Une fois le royaume de nouveau sous son commandement, il ne pourra pas se permettre de bévue.

« Si nous les aidons, ils nous soutiendrons en retour, tel est le marché qu’on a conclu avec le roi Kumpa, ainsi les deux clans ont à y gagner. C’est le seul espoir qu’on peut placer pour espérer délivrer Freeland et vaincre les Nyeusis Sir. A présent c’est à vous de prendre la suite avec les Freelanders libres, à la Land des sans-terre. On tachera de trouver les autres éparpillés sur la Terre des lions et de les ramener ici.
»

Oui, rassembler les Freelanders chassés par Sharkan, c'est la première chose censée à faire. Et les demandes des Pridelanders lui semblent tout à fait acceptables. Les aider eux pour qu'ils les aident en retour. Leur territoire se trouve avant Freeland, il faudra donc obligatoirement le dératiser avant de s'attaquer aux terres de Déjem. Le grand mâle réfléchit un moment. Ils se trouvent à présent en majorité, peut-être que d'autres fidèles à la l'ancienne monarchie se trouvent encore sur place et pourront se rallier à leur cause une fois arrivés.

« Voilà ce qu’on a fait en votre absence et ce qu’on vous propose maintenant Sir. Aujourd’hui c’est à votre tour et également à celui de Haki, à vous de montrer que vous pouvez reprendre votre place. »

Déjem se redresse, posant son regard d'émeraude sur le jeune mâle tout en s'asseyant. A-t-il vraiment le choix de toutes manières ? S'il souhaite récupérer son royaume, il doit pouvoir compter sur l'aide de Prideland, sans quoi il risque bien d'y laisser sa peau. Il inspire profondément avant de répondre à Sabaru

« Très bien. Nous nous allierons donc à Prideland dans le but de reprendre ce qui nous reviens de droit. Haki et moi-même vous rejoindrons sous peu, le temps que je l'informe de tout cela. Une fois sur place nous déciderons ensemble de la méthode à adopter afin de chasser Sharkan de nos terres, aussi bien à Prideland qu'à Freeland. »

Le grand mâle lève la tête vers le ciel. Le soleil à bien décliné depuis qu'il a rencontré Sabaru et il commence à se faire tard. Il faut absolument qu'il retrouve Haki le plus vite possible pour l'informer de son choix. Il se relève, incline la tête en direction du mâle caramel et s'explique rapidement.

« Il se fait tard et je dois retrouver Haki avant la tombée de la nuit. Je vous retrouverais mais mieux vaut se séparer pour le moment, un groupe nombreux attire plus les regards indiscrets que quelques lions errants. »

Le roi déchus tourne les talons sans même accorder un dernier regard à Sabaru, lentement, la tête haute comme il en a l'habitude.

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