La brume s’installait sur la Terre des Exilés, en passant une brise fugace et brève sur la fourrure terreuse des Outlanders. Rien qu’en ressentant cette bourrasque frôler leurs parties, certains éveillés par le crachin et le vent frisquet se dirigeaient en direction de leurs trônes respectables. A regarder l’horizon, il semblerait que l’aurore lui-même n’avait pas encore percé les nuages sombres et crépusculaires s’annonçant au-dessus des têtes. L’habitude était très présente, et certains ne se plaignaient pas de l’atmosphère lourde pesante sur Outland. De l’autre côté, les terres semblaient plus aisées et comblées, et la Terre des Exilés ne connaissait point la goutte d’une seule averse. Le territoire semblait comme avant resté intacte après l’embuscade des hyénidés hormis l’odeur nauséabonde se dégageant des moindres recoins, chatouillant désagréablement le museau de mes semblables.

Je me levais, là, me dégageant de la Termitière. Les autres étaient encore dans les bras de Morphée, moi de même je m’étais débattue pour me défaire de ses bras célestes. La chaleur des Outlanders endormis se dégageait, et je fus surprise de déclencher un train-train au sentiment de cette tiédeur. Et dire qu’hier, nous nous battions pour retrouver nos terres légitimes contre ces chiennes perfides … Ce rêve – considéré comme utopie naguère – s’était réalisé aujourd’hui. Nous profitions de notre propriété et notre victoire aussi bien que jadis, sans doute nous les perdrions au moindre faux pas. Malheureusement, même si notre triomphe fut célébré de tous, un certain vide perturbait mon cœur … Massempo fut peu distant en ma présence, au profit de la lionne brune sauvage aux habitudes farouches. Peu à peu, je semblais le perdre : l’amour de ma vie, la clef de mon cœur, commencerait-il à me délaisser tel un vulgaire fardeau ? Cette pensée me provoquait des spasmes et un pincement au cœur, mais au fil du temps, j’avais dû me résoudre à le considérer comme un amour de jeunesse. Avant de me lever et de balayer les cendres de mon pelage terreux, je jetais un regard de dégoût au couple reposant tout au fond de la Termitière ainsi qu’aux lionceaux endormis sur leurs torses. Des sentiments de nostalgie vinrent frissonner en moi. Cette image me rappelait d’immenses souvenirs blessants, où Massempo & moi écoulions nos jours heureux au pas de Tahani. D’ailleurs, mon émeraude n’était pas présente au milieu de cette moiteur ‘’familiale’’ : où était-elle donc ? J’avais si peur qu’une chose effroyable lui arrive que le statut mère poule s’offre à moi à grande aise …

Je me résous donc à quitter me lieu où séjournait le repos. A chaque pas, mes coussinets balayaient de la poussière et l’envoyait valser sur les alentours. J’avais reconnu la bonne et ancienne terre qu’était Outland. Un sourire faible vint peinturlurer mon visage, mais il disparut complètement après avoir été pincée au cœur. Tête basse, je fonçais lente aux abords et j’errais sans but précis. Le matin sombre qui avait demeure Outland était bien serein, et seuls au loin, des éclaboussements se faisaient entendre. Les reptiles s’étaient peut-être éveillés, et leurs écailles kaki aspergeaient d’une douceur inouïe de minuscules vagues au ruisseau. Une mélodie qui avait attiré mes pavillons : mes pas firent demi-tour, enchantés par l’euphonie des jets. Le lieu euphonique était effectivement le domicile des crocodiles, et je semblais aveugle face au danger qui pouvait s’annoncer à côté de ces sauriens : morsure, attaque ou même pire, la mort ? J’essayais de rester au moins proche du rivage, en évitant de plonger la moindre articulation dans l’eau. Les reptiles m’avaient remarqués et avaient détectés mes gestes prudents puis enfin, n’avaient heureusement pas considéré mon approche comme attaque ou autre attitude brusque.

Un soupir au fond bon échappa de ma gueule, et en fermant des eux, je reposais en songeant. Si un des crocodiles s’approchaient, j’aurais à le détecter puis m’éloigner soigneusement … Mais dans ce site, je croyais être seule en compagnie des carnivores, mais je me trompais à un haut point. Une autre silhouette, au loin, se dessinait noire. Proche de la rive, était-elle consciente du danger qu’elle accourrait ? En s’approchant par dividende, la forme était celle d’un félin tacheté à la crinière courte. J’avais su le reconnaître, c’était le guérisseur du clan : Killik, le lion aux deux sangs et à la croyance divine. Je m’arrêtais avant de venir à sa hauteur, un sourire dynamique sur mes babines et à l’attitude joyeuse – même si je n’éprouvais pas cela sincèrement pour cause des événements récents.

« Bonjour, Killik. Déclarais-je, d’une voix suave. Que faîtes vous de si bonne heure ? » Finissais-je. Le liard attirait ma curiosité et il avait l’air sympathique. Cette rencontre pourrait illuminer ma journée égarée dans els pénombres (ou du moins, j’espérais…)

Ses questions ? Ma curiosité laissa place à un regard intrigué dont seul ses réponses pouvaient le détacher de ma frimousse. Sur le côté, ma tête dérober pour faire place à une expression confuse. Je ne voulais pas épier des fenêtres pour percer des secrets ou encore inventer d'étranges ragots. Mais, ses deuxièmes paroles tombaient comme la udre sur la plaine aride : droite et juste, considérant sa cible sans s'estomper. Elle tombait comme une sentence, et ses éloquences n'étaient toute fois pas apocryphes et feintes. Killik avait senti en moi ce manque de tendrese et d'allégresse et cette illusion d'abandon, je ne pouvais le cacher longtemps ... L'honnêteté est une chose dont je ne délaisserai aux mains de l'hypocrisie. Le Liard posa un regard lent en plissant les yeux sur moi, réclamant la vérité.

« Je ne veux surtout pas imposer d'autres problèmes au clan. Mes douleurs sont personnelles... Mon coeur resent un manque. Je suis délaissée tel un vulgaire fardeau par Massempo.»

Prononcer ce nom me brûlait la pense. Mes griffes, par anxiété, raclaient la terre aride et humide, je voulais émettre un grognement mais la présence de Killik m'apaisait. Ces croyances divines semblaient réelles : tantôt les lions y croyaient et tantôts les lions les niaient. À chacun son mythe, sa tradition... Les farouches dont ces lions noirs se moquaient de ces mythes : cela ne les avait pas empêchés de voler le territoire Pridelander et de les sauver de cette guerre. Provoquer mon courroux en pensant au lion brun détruirait l'ambiance présente entre nous, et je ne souhaitais point cela : le lion hybride avait une conscience qui m'attraper à l'aide de sa toile. Mon esprit n'avait qu'un seul but : percer le secret de sa tranquilité inouïe... Jamais le lion à la fourrure peinturlurée de tâches n'avait éprouvé le sentiment de la fureur à mon égard, et je serais surprise si par malheur un jour, un des courroux semblables au miens l'emporterait. Cependant, aucun félidé n'avait pas supporté ses amertumes et le rugissait intensément, mais que le Chaman s'oppose à l'appel enchanteur de la colère m'intriguait.

Poursuivant son récit, Killik considérait les Nyeusis comme des ombres menaçantes aveuglants les rayons de soleil. Je sentais les frissons de la peur déborder de Killik, bien qu'il se montrait robuste. Je ne devais pas lui reprocher cela : il avait su rester courageux face aux lions ébènes et avait contré son effroi à plusieurs reprises, mais allait-il rester insoumi face à la peur ? Mais comme nous disions, l'audace et la bravoure sont prouvés au moment où les spasmes de la frayeur apparaîssent. Au fond, nous étions les mêmes : seule la personnalité de chacun nous différençait de ce qui nous fûmes et de ce que nous étions. Attendre ne ferait qu'empirer, j'aurais voulu le citer dans mes propos mais sa parole faisait illusion à l'Espoir. Servait-il toujours d'espérer ? Je tenais de tout mon coeur à ce que le tirs des Nyeusis sur nous ne soit pas encore lançé. Leur force et leur taille était une arme chargée dont un seul mouvement pouvait déclancher le parcours de la balle... Les Grands Esprits selon le débit de Killik approuvait sa thèse : ne jamais baisser les pattes. Au fond, je sentais que cette parole me considérait et m'étais adressée. Jamais je ne laisserai Massempo fuir de mes coussinets au profit de la sauvage...

« Penses-tu que les Grands-Esprits seront toujours là avec nous quoiqu'il arrive ? lui adressais-je dans un murmure, comme si le sujet était tabou. Pourquoi mes ancêtres m'écartent de Massempo ? »

Aux paroles du Liard, je savais que j’étais obligée de parler. Killik était quelqu’un à qui les secrets furent confiés sans hésiter, et d’ailleurs, ce dernier n’avait jamais osé divulguer leur existence. Devrais-je lui accorder ma confiance ? Ses yeux restaient rivés sur mes prunelles, réclamant une réponse du moins honnête. Il persistait et ne voulait pas me voir succomber à mes secrets. Un moment, ses yeux rivèrent vers l’horizon pour trouver une éloquence raisonnable après ces paroles.

« J’ai peur d’être jugée … » ajoutais-je, en fixant mes pattes.

A quoi bon confier mes courroux aux exilés ? Le fardeau était que ces derniers pouvaient juger n’importe qui sans se gêner, et la peur d’être blâmée m’enflammait. Au fond de moi, je ne sentais pas ce besoin de me confier aux autres. Seule Tahani pouvait vraiment me comprendre sur ses terres, et personnes d’autres n’avait su percer mon cœur.

Killik m’expliqua que les Grands Esprits n’avaient jamais choisi au hasard une chose pour le destin et que chaque parcelle de méfait était en fait un obstacle à franchir pour ouvrir la porte. Mais la serrure semblait verrouillée et seule l’ombre de Massempo passait, me bloquant ainsi toute issue possible avec la lionne aux habitudes sauvages, portant le nom de Khiaja accompagné de leurs fruits. Etait-ce vraiment le but de l’amour ? Briser des années d’affection et ruiner un amour sincère ? L’amour avait ses raisons, et la logique semblait ne pas prendre en compte cela.

A un moment, Killik m’indiqua de changer de cap et prendre une nouvelle voie en laissant mes amertumes passées derrières moi. Les cicatrices et le cauchemar où j’avais cru que les ombres s’alliaient pour m’emporter dans leur fléau était réelles. La mélancolie commençait à m’emporter depuis peu et je comptais juste sur l’espoir et l’image que Massempo m’aimait toujours pour me porter jusqu’à la rive. Mais le tronc m’emmenait toujours plus loin et m’éloignait du rivage, et je me nourrissais de mon amour éphémère. Le Liard avait surtout confiance en moi et son regard s’était étayé et s’était égaré dans mes yeux de feu, inspirant ainsi sa confiance en moi et qu’il savait que je franchirai cette épreuve sans être bousculée par mes sentiments d’antan.

« Comme vous avez confiance en moi, Killik, je vais essayer, un sourire se peint sur ma face. Dîtes moi, Killik, n’avez-vous pas des choses à confier ? Tout le monde a des problèmes … Je vous serai d’une bonne écoute. » Ajoutais-je, intriguée.