Quitter les terres de Freeland durant une bonne journée, voilà ce qui faisait du bien à Haki. Il s'était éclipsé lorsque le soleil avait pointé le bout de son nez, sans dire à Dejem où il comptait se rendre, préférant rester vague. Il n'avait de toute manière lui non plus pas vraiment d'idée sur sa destination, avant d'apercevoir le Rocher de la Fierté, au loin. Il s'était donc mis en route, désireux de s'éloigner de ce territoire où tous semblait chercher à le tuer ou à l'amener au tyran. Il avait certes fait quelques positives rencontre, comme Itan ou la petite Chinja, mais cela ne suffisait pas à lui retirer l'idée qu'une révolution serait une chose folle et dangereuse, et qu'il fallait s'en tenir éloigné. Le prince déchu avait besoin de repos, de penser à autre chose, de voir d'autres horizons que l'éternel brume des Montagnes Humide où il avait élu domicile avec son père, pour un temps encore indéfini. Il ignorait combien de jour ils seraient en paix là bas, avant que quelqu'un ne les repère et qu'ils ne doivent encore s'enfuir. Telle était leur vie depuis près d'un an, à toujours courir, courir le plus vite et le plus loin possible des sbires de Sharkan, sans pour autant quitter les Terres Libres. Elles n'étaient d'ailleurs pas bien libre, pour Haki et son père, depuis qu'ils étaient en exil.

Le jeune mâle tâchait de garder ses pensées hors de son esprit, mais elles ne cessaient de l'assaillir sans relâche. Il ne trouverait du repos qu'hors de Freeland, là où personne ne désirait le tuer, normalement. Certes il venait en intrus, mais tant qu'il ne chassait pas, il ne faisait rien de mal, non ? Il ne connaissait pas tellement les lois en vigueur sur Prideland depuis la mort de Farao, mais les choses n'avaient pas pu devenir dramatique. On racontait que le prince Kumpa, l'héritier, n'avait pas encore pris la place de son père et que c'était Misadaa le majordome du défunt monarque qui régnait. C'était une situation des plus inhabituelle, mais il y avait sans doute des raisons à cela, et ce n'était pas Haki qui allait se mêler de leurs affaires, loin de là. Il en avait déjà bien assez avec les siennes pour fourrer son museau dans les problèmes politiques des autres clans. Il aurait donné très cher pour ne pas être né prince et pour pouvoir mener une vie tranquille en compagnie d'autres lions, sans craindre de se faire agresser s'il se montrait. Malheureusement, tout ça n'était visiblement pas pour lui. Le mâle brun soupira. Sa vie n'était pas comme il l'aurait souhaité, mais il ne pouvait pas en changer comme bon lui semblait, ça aurait été bien trop facile.

Le prince en exil se trouvait à présent dans la Savane, une grande plaine d'herbe sèche où les troupeaux se trouvaient en masse. Il n'avait toutefois pas le droit de chasser, il le savait et ne prendrait pas le risque de se faire attaquer par un Pridelander parce qu'il avait désobéit aux lois de leur clan. Il était déjà pourchassé dans Freeland, il ne voulait pas l'être partout. Il pouvait néanmoins se promener et profiter d'un peu de calme, pour une fois qu'il y avait droit. Un bruissement dans les herbes, non loin de lui, attira toutefois son attention et fit frémir ses oreilles. Etait-il épié ? Haki se tourna et chercha du regard celui ou celle qui semblait l'observer à son insu.

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Haki ne mis pas longtemps à repérer l'animal qui le fixait à travers les épaisses touffes jaunâtres qui formaient la végétation de la savane. C'était un lion, d'une taille correcte sans être impressionnant, au pelage plutôt terne pour un Pridelander. Son odeur était pourtant celle des habitants des terres de la fierté, cela ne faisait aucun doute. La crinière de nouveau venu était sombre, s'approchant du noir parfait sans le saisir et ses yeux dorés semblaient lire à travers le prince déchu. A vu d’œil, il pouvait juger que le mâle devait avoir son âge, à quelques mois près, ce qui n'empêcha pas Haki d'éprouver une certaine méfiance. Il devait se montrer prudent, il ne cessait de se le répéter depuis sa rencontre avec Itan qui aurait pu lui coûter la vie si les choses en avaient été autrement. Le Pridelander souriait, ce qui étonna légèrement le fugitif. Certes, les lois étaient assez souple ici, du moment qu'on ne chassait pas, mais il s'était tout de même attendu à une attitude un peu plus agressive de la part des propriétaires de ce territoire. Il restait un intrus, après tout. Peut être qu'être en cavale depuis un an l'avait habitué à devoir éviter d'être repérer, il en venait à oublier qu'il n'était pas ennemi partout.

Le lion à la robe terne se dirigea néanmoins vers lui, signe qu'on ne laissait pas vagabonder les intrus librement quand même sur Prideland, ce qui était plutôt normal en fin de compte. Cela ennuyait tout de même un peu Haki, qui avait espéré qu'on le laisserait tranquille, tout en se doutant bien qu'il ne serait jamais réellement libre, où qu'il soit. Cette pensée le fit soupirer intérieurement. Au moins, le nouveau venu n'avait pas l'air hostile, c'était déjà ça. Le prince en exil n'avait pas envie de se battre, pas envie de fuir. Pour une fois, il voulait qu'on accepte sa présence, qu'on ne voit pas en lui un parasite. Il finissait par avoir l'impression que même son père le trouvait indésirable, depuis qu'il avait exprimé son manque d'ambition dans ses plans pour renverser Sharkan. Haki remarqua alors que lion était à présent plutôt proche de lui et qu'il avait la gueule ouverte, comme pour dire quelque chose.

- Bonjour. Tu es perdu sur ces terres ? Tu es sur le territoire Pridelander mais tu n'as pas franchi les limites imposées donc je n'ai aucune raison de te chasser inutilement.

La voix était sereine, nullement agressive, presque joviale. Le mâle brun ne pouvait qu'en être surpris, il n'avait pas imaginé ce genre d'approche. Il esquissa cependant un sourire, rassuré quant aux intentions de son interlocuteur. Ce dernier ne semblait pas savoir qui il était, ce qui n'était finalement pas si étonnant. Les Pridelanders ne devaient pas s'intéresser aux histoires de Freeland, cela ne les concernait pas, et même s'ils devaient avoir entendu parler du règne de Sharkan, il y avait fort à parier que ce lion ne sache pas à quoi ressemblait le roi déchu et son fils. Le félin à la crinière noire ajouta alors ;

- Je suis le prince de ces terres.

Les yeux d'Haki s'écarquillèrent de surprise. Il lui disait ça, comme ça, sans préambule ? Voilà qui était des plus... Déroutant. Le mâle brun chercha dans sa mémoire le nom des deux héritiers de Prideland, se souvenant d'un certain Kumpa, l'aîné, et de Damu. Ses dernières leçons d'histoires remontaient à son enfance, avant que Sharkan ne prenne le pouvoir, mais il en avait encore un vague souvenir. Farao était encore le roi à cette époque, mais on racontait qu'il était mort depuis, dans d'obscurs circonstances. Le fugitif se demanda quel prince lui faisait face, de Kumpa ou de Damu, et se souvint qu'on lui avait parlé du premier comme d'un lion au pelage doré et à la crinière rousse, tandis que le second tenait plus du défunt monarque, avec une robe sombre. Il y avait donc fort à parier que ce soit celui-ci qui lui fasse face à l'heure actuelle, même s'il ne pouvait être sûr de rien. Sa propre réponse allait compter, et il se demanda s'il devait mentir, ou bien être honnête. Qu'avait-il à craindre d'un Pridelander après tout ? Il n'obéissait pas au tyran de Freeland, lui, et avait ses propres soucis. La vérité lui vint donc naturellement.

- Je m'appelle quant à moi Haki, également prince mais... Ce n'est pas simple. Enfin bref, tu es Damu, c'est bien ça ?

Il avait tâché de prendre un ton léger mais il adoptait tout de même une certaine retenu. Il ne savait pas encore comment il réagirait à ses brèves paroles, espérant ne pas l'avoir froissé par son manque d'explication. S'il lui en demandait, il s'étendrait d'avantage, mais ne voulait pas non plus raconter son histoire à un lion qu'il venait simplement de rencontrer, qu'il soit en membre de la famille royale de Prideland ou non.

- Oh et, je ne suis pas réellement perdu. J'avais besoin de m'aérer l'esprit, loin de Freeland. Je ne veux causer de tord à personne, je n'ai nullement l'intention d'enfreindre les lois de ton clan.

Il avait cette fois eu une voix d'avantage d'amical, où son amertume pouvait se sentir. Ce n'était pas tant de l'amertume qu'une grande lassitude, une fatigue immense quant à la vie qu'il menait. Damu avait une chance incroyable de pouvoir vivre en paix dans son clan, même s'il devait probablement avoir d'autres soucis. Haki n'était pas idiot, il se doutait bien que la vie n'était pas forcément rose ailleurs également.

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L'expression du prince de Prideland resta amical, apaisant les dernières craintes que l'exilé pouvait avoir. Il ne s'inquiétait plus de se faire attaquer par son interlocuteur, celui-ci semblait d'avantage vouloir discuter que se battre. Il n'était ni hostile ni menaçant, plutôt ouvert et souriant. Un tel accueil était surprenant, et rare aux yeux d'Haki, qui se sentait toujours traqué et agressé partout où il allait. Ceux qui le soutenaient étaient rare, et ils ne se montraient pas, de peur que Sharkan ne se débarrasse d'eux. Ils avaient bien raison de rester discret, le mâle brun prenait des risques en dévoilant son identité à trop de monde, et il le savait. Son instinct lui soufflait de se révéler à tel ou tel lion, et il le faisait, naïvement. Il avait vraiment besoin de grandir, cela lui aurait fait le plus grand bien. Il fallait qu'il cesse de faire confiance au premier venu, où il s'attirerait réellement de graves ennuis. Le félin à la crinière noire prit alors la parole, explicitant certaines zones encore sombres, et mettant fin aux pensées du fugitif.

- Oui, je suis bien Damu. Sinon, je comprends ton envie de prendre un peu l'air si je puis-dire. A Prideland, nous aussi nous avons la vie dure en tant que prince. Je me doute bien qu'elle ne dois pas l'être à Freeland. La seule chose que je sais est qu'un tyran à pris le trône de force. Je dois bien me douter que vous avez été exilés. Nous avons aussi comme un "tyran" à Prideland. Sauf que ce tyran là est ... quelqu'un qui utilise plutôt son intelligence que la force brute.

Haki haussa un sourcil, surpris par cette révélation. Il ignorait que les choses allaient mal sur Prideland. A ses yeux, ce royaume était toujours prospère et il y faisait bon vivre par tous les temps. Il était au courant pour la mort de Farao, mais il avait simplement pensé que la reine Malkia était devenue régente en compagnie du majordome, en attendant que Kumpa soit prêt à prendre la place de son père. Cette situation était un peu surprenante, car en temps normal, le fils aîné montait sur le trône à la mort de son géniteur s'il était en âge de régner. Si Damu était plus jeune que son frère, cela signifiait que l'héritier devait largement être assez vieux pour prendre ce rôle. C'était donc une situation des plus étonnante, et inquiétante aussi, s'il en croyait les propos de son interlocuteur. Parlait-il du majordome, ce fameux Misaada dont Haki avait déjà eu vent ? C'était apparemment un très vieux lion malicieux qui avait toujours participé aux magouilles royales. Il avait longuement servit le défunt monarque, il était aujourd'hui surprenant qu'il ne laisse pas Kumpa devenir Roi. Damu continua, après avoir affiché un visage pensif.

- Vivre en paix en tant que prince n'est qu'un rêve éphémère en ces temps. Pardonne moi d'être aussi cru. Je me doute bien que cela ne doit pas être facile pour toi, mais si je peux te venir en aide d'une quelconque façon que ce soit, je t'aiderais. Cela te paraîtra stupide de proposer ça à un inconnu, mais je ne peux que trop comprendre ce que tu ressens. Vouloir vivre en paix et fuir, c'est ce que je désire aussi. Mais mon envie sauver ce clan est la seule chose qui me retient. C'est égoïste, n'est-ce pas ?

Les paroles du prince de Prideland faisaient écho à ce que pensait Haki, étrangement. Il n'avait jamais imaginé qu'un autre membre d'une famille royale puisse avoir la même réflexion, le même désir de liberté. Il avait toujours songé que tous les autres devaient mener une existence heureuse au sein de leur clan, avec leurs soucis politiques certes, mais sans autre crainte que celle d'avoir une bonne place aux côtés du Roi. Lui devait d'abord penser à survivre, ensuite il envisagerait le reste. Le trône ne l'intéressait plus depuis longtemps, mais beaucoup le convoitait, il en avait conscience. L'image du puissant Sharkan s'imposa à lui, et il frémit. Oui, il était égoïste lui aussi, et lâche également. Ce n'était pas son envie de sauver le clan qui le retenait sur Freeland, c'était son père. Il ne pouvait pas le laisser seul, il sentait que son devoir le plus intime était de le protéger de sa propre haine. Il n'avait toutefois pas réussi à le convaincre d'abandonner cette révolution insensée, pas encore. Il avait toujours un espoir, au fond de lui, que Dejem accepte de partir une bonne fois pour toute. S'il refusait, il n'y avait plus qu'à espérer qu'il y ai assez de rebelles pour les soutenir. Sinon, ils étaient perdu, tous les deux.

- On ne devrait pas coller une étiquette à un lion en lui donnant le titre de prince si lui-même ne se sent pas capable d'assumer et protéger tout ces lions. C'est bien de ça dont le tyran qui à volé la confiance du clan se moque. Il sait que je ne rêve que de paix, pas d'un royaume. Mais je ne peux plus fuir. Pas tant qu'il sera la.

L'exilé cligna des yeux, un peu incertain. Il n'était pas sûr de comprendre ce que voulait dire Damu, car il ne connaissait pas toute la complexité de la situation à Prideland, mais il voyait de quoi il voulait parler. Haki se demanda, avec une pointe de gêne, si le véritable tyran de sa vie était bel et bien Sharkan, ou son père. Dejem voulait faire de lui un prince, un révolutionnaire, un héros. Il voulait tuer le leader actuel de Freeland pour reprendre ce qu'il considérait comme son dû. Aveuglé par sa haine, il n'acceptait pas que son fils puisse avoir une pensée différente qu'il ne veuille pas de cette responsabilité qu'il lui mettait sur les épaules. Ce n'était pas lui qui avait voulu de cette tyrannie pour son peuple, au contraire il ne voulait que les sauver. Et cette révolution qu'il envisageait, Haki n'avait foncièrement rien contre. Sharkan était un mal pour Freeland, il le voyait bien. Mais il ne voulait pas avoir un rôle de meneur dans tout ça, ni même y prendre part. C'était parfaitement égoïste, il en avait conscience et cela le torturait, mais il ne pouvait pas nier ce qu'il ressentait au fond de lui.

- Peut être ne sommes-nous juste pas assez... Pas assez brave pour assumer ce rôle qu'on veut nous imposer. Je ne suis pas sûr d'être fait pour être prince, pour mener qui que ce soit vers une bataille ou pour assurer un avenir meilleur pour les miens. Ce n'est pas que je n'en ai pas le désir, c'est simplement que... Ce n'est pas moi.

Son regard de jade troublé, Haki n'osait lever la tête vers Damu pour croiser ses prunelles dorées. Malgré ce que le lion à la robe terne lui avait confié, il avait honte de dévoiler ses faiblesses, de dévoiler sa lâcheté à un autre lion, un autre prince qui plus est. Il finit néanmoins par se redresser, essayant de paraître moins sombre, plus joyeux. Ce ne fut pas facile.

- Je te remercie de ta proposition. Ma situation est un peu compliquée sur Freeland. Sharkan, le tyran, souhaite me voir mort. Alors, je me dois d'être le plus discret possible, de me cacher. Mais parfois, j'aimerais juste pouvoir être fier de ce que je suis, sans pour autant y arriver.

Sa voix se brisa à la fin de sa tirade, il se sentit ciller. Il n'avait jamais réussi à exprimer pleinement ce qu'il ressentait, et pourtant il venait d'arriver à se confier à cet inconnu. Peut être parce qu'il était prince, peut être parce que c'était un jeune lion de son âge. Ou peut être pour autre chose, une chose infime et presque insensible.

[Ne t'inquiète pas, c'est parfait ! ]

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Le prince de Prideland sembla se plonger dans ses pensées suite aux paroles du fugitif, et ce dernier était également songeur. Il ne pensait pas prendre de grands risques en se révélant à Damu, ce dernier avait l'air digne de confiance et n'aurait de toute manière aucun intérêt à le dénoncer au tyran. A moins que les relations entre Freeland et les terres de la fierté ne soient tendues, mais Haki n'avait jamais eu vent de ce genre de problème. Si ce cas se présentait, il y avait fort à parier que, pour ramener la paix, les dirigeants la négocie avec l'exilé qu'il était, se servant de lui comme une simple marchandise à échanger. Cette idée le répugnait assez, mais il pouvait comprendre que le régent de Prideland fasse passé son clan avant la vie d'un prince déchu, surtout s'il était si cruel que le dépeignait le mâle à la crinière noire. Le portrait qu'il en avait fait n'était pas des plus flatteurs, et Haki n'avait aucune idée de s'il était méritait ou non. Un jour peut être croiserait-il la route de ce Misaada, si les Grands Esprits le voulait. La voix de Damu résonna alors, déferlant une masse importante de mots. Haki du se concentrer pour ne manquer aucune information.

- C'est vrai, la bravoure n'est pas donnée à tout le monde. Mais nous avons quelqu'un ce que bien d'autres n'ont pas en ce triste monde, Haki. Le sens des valeurs. Tout vient du cœur, peu importe notre égoïsme ou notre lâcheté, nous tentons malgré nous de faire de notre mieux et comprendre les autres. C'est parfois triste en tant que prince d'échouer, mais au final … Sans ça, nous n'aurions pas la force de continuer d'avancer. Peu importe si tu ne te sens pas capable de gouverner sur un royaume Haki, n'oublie pas que certains te comprendront et d'autres non. Ton devoir est certes celui de gouverner, devoir qui est devenue une corvée pour toi. C'est parce que nous avons découvert à quel point le monde était lui aussi lâche et égoïste. Mais n'oublie pas que peu importe tes décisions ou tes choix, quelqu'un sera toujours là pour t'épauler et t'aider. C'est ce qu'apportent les grands esprits aux gens biens comme toi : Ceux qui au fond d'eux veulent le bien des autres et ce, avant le leur. Moi … je te comprends. Pas en tant que prince, mais en tant que … lion. Un lion banal. Rien de plus, ni de moins. Le lion banal que toi et moi voulons être.

L'exilé hocha la tête. Depuis qu'il avait été chassé de Freeland, il ne rêvait que de cela. De pouvoir s'enfuir et mener une existence ordinaire, heureuse, paisible, loin de Sharkan, loin de la vengeance à laquelle son père aspirait, loin de ces regards plein d'espoir qu'on avait déjà jeté sur lui, que ce soit Dejem ou même Itan. On croyait en lui, alors qu'il ne voulait pas endosser ce rôle là. Il n'avait rien d'un meneur, rien d'un révolutionnaire. Il n'était pas plein de haine envers le tyran, il en avait surtout peur, tout comme il était effrayé devant ces grands lions noirs qui obéissaient à son ennemi et qui donc, voulaient sa mort. Avait-il quelqu'un pour l'aider et l'épauler, comme le disait Damu ? Il avait son père, mais ce dernier ne cessait de l’exhorter de se battre contre le tyran, de mener la rébellion, d'être celui qu'il n'était pas. Il y avait également Itan, ce Freeland qui lui avait donné un espoir. Mais ce dernier détestait également Sharkan, et voulait le voir renversé. Pouvait-il alors comprendre ce que ressentait Haki ? Il pensa également à la petite Chinja, mais celle-ci n'était qu'une enfant, et elle semblait apprécier le tyran. Elle ne réalisait pas le mal qu'il avait répandu autour de lui, ni la souffrance que ressentait le prince déchu. Finalement, pour trouver quelqu'un qui le comprendrait, il avait besoin de quelqu'un d'extérieur à Freeland, qui n'aurait pas l'ardent désir de voir le terrible dictateur brun tomber, ni qui le soutiendrait. Il lui faudrait un être neutre.

- Enfin … je crois que pour le moment, la moindre des choses est de croire en nous et aux autres, puis de continuer d'avancer. En ce qui concerne ce tyran qui cherche à te tuer, si tu le veux bien, je peux tenter d'en parler à mon frère prochainement. Je me doute que vous devez être obligé de voyager pour le fuir, mais mon frère m'a déjà fait part de la situation de Freeland, que ce soit à propos de toi et ton père ou bien des lionceaux et je pense que la moindre des choses est de pouvoir vous aider. Je tairais votre identité. Si vous avez besoin de nourriture ou de quoi que ce soit d'autre, tu pourras compter sur moi et mon frère, Kumpa. Il n'est pas méconnaissable avec sa crinière atypique et son pelage aussi jaune que le soleil ainsi que ses yeux bleutés et je doute qu'il refuse de tendre sa patte à quelqu'un dans le besoin.

Damu venait de reprendre la parole, pour encore un long monologue. Haki constata que son interlocuteur semblait un amateur des grandes tirades, et que lorsqu'il était lancé, on ne l'arrêtait plus. Il fit une fois de plus un effort d'attention pour capter tout ce qui avait été dit, et fut étonné de la proposition du lion à la robe terne. L'héritier de Prideland lui tendrait-il la patte ? Il ne l'avait jamais rencontré, ne savait pas quel était son caractère, mais s'il était le frère de Damu, il ne devait pas être bien méchant. Dejem serait bien entendu enchanté d'une alliance avec les terres de la fierté, Haki n'en avait aucun doute. Même s'il n'avait pas envie de devenir un leader, il n'avait pas non plus envie de mettre des bâtons dans les roues de son père. Qui plus est, Prideland pourrait peut être les accueillir le temps qu'ils passent à l'action. Ils auraient plus de nourriture, et avec la protection d'un vrai roi, ils seraient en sécurité. La haine de Dejem retomberait peut être un peu, s'il avait un endroit paisible pour vivre. L'espoir égoïste du fugitif renaissait dans la proposition du prince. Finalement, ses chances d'avoir une vie normale n'étaient pas mortes, elles existaient toujours. Il lui répondit, le timbre de voix moins sombre que précédemment.

- Je pense que rencontrer ton frère serait en effet une bonne chose pour mon père et moi. Je ne sais pas quel est son rôle au sein de Prideland à l'heure actuelle, étant donner que tu m'as parlé de votre propre tyran qui règne à sa place, mais il pourra toujours nous être d'une grande aide, j'en suis sûr.

Comme il l'avait supposé, son identité serait bien garder par Damu, il ne le vendrait pas à Sharkan. Le soutien de Prideland était quelque chose de précieux, même si Haki se doutait bien que le célèbre Misaada ne réagirait sans doute pas comme le prince à la crinière noire. Mais ce dernier n'était que régent après tout, il ne régnerait pas pour toujours. Déjà lorsqu'il était enfant lui-même, on racontait que le majordome de Farao était extrêmement vieux. Quel âge devait-il avoir aujourd'hui ? Il était probablement encore plus vieux que le grand père du fugitif, mort pendant une fameuse grande chasse. Haki reprit, le regard dans le vague.

- J'ignore si je gouvernerais un jour. Je ne le souhaite pas, et cela ne me semble même pas réalisable à l'heure actuelle. Mon père veut soulever une révolte et espère que j'en serais la tête de proue. Mais je n'ai pas l'âme d'un chef, je n'ai ni la force de Sharkan, ni son charisme, ni la soif de vengeance de Dejem pour guider mes pas. Je ne suis pas Kundi l'Unificateur, même si c'est ce que beaucoup aimerait voir en moi. Il est vain d'espérer qu'ils comprendront mon désir d'une vie normale, le tyran leur a fait trop de mal. Ils ont besoin d'être délivré, mais crains de ne pas être le salvateur qu'ils attendent tant.

Le mâle brun se mordit la babine, rencontrant à nouveau le regard de Damu. Des lions se rebellaient-ils contre Misaada sur Prideland, soutenant Kumpa et la lignée royale ? C'était fort probable, et l'héritier devait attendre que son frère tienne un rôle important dans tout ça, en restant à ses côtés, fière figure du pouvoir. Avoir constamment le second rôle ne devait pas être des plus plaisant, mais le lion à la crinière noire ne semblait pas tant en souffrir. Au contraire, il avait confié ne pas vouloir des grandes responsabilités. Ils n'étaient donc pas bien différent, finalement.


[J'ai eu le même bug que toi il y a quelques jours, je pense que ça vient de Forumactif ><]

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Le visage du prince de Prideland exprimait de la compréhension ainsi que de la compassion. C'était la première fois pour le mâle brun qu'il rencontrait quelqu'un qui, d'une part, pouvait appréhender sa situation et, d'une autre, le regarder sans ces étoiles effrayantes dans les yeux. Haki n'aimait pas voir l'espoir naître dans les prunelles des autres, car la déception y apparaissait bien vite. Les Freelanders se rendraient rapidement compte que leur fameux prince n'avait rien d'un leader, qu'il était un poltron dépourvu de la force et de la bravoure de son ancêtre. Il n'avait que bien peu connu Kundi, ce dernier était mort alors que l'exilé était tout jeune, mais Dejem en parlait souvent, comme d'un héros pour leur clan. Il avait unifié Freeland, en avait fait une unique patte puissante et Sharkan pouvait s'en servir désormais. Personne ne pouvait imaginer les ambitions du tyran, qui dépassaient probablement les limites de ce qu'il avait déjà obtenu. Il était réellement dangereux, il ne fallait pas s'y tromper. Voilà pourquoi le fugitif en avait si peur et ne tenait absolument pas à se retrouver face à lui un jour. Peut-être ne pourrait-il même pas y échapper... Damu reprit la parole, le prince déchu leva les yeux.

- Je suis ravi que cela te plaise. Dans ce cas, pourquoi ne pas s'organiser une future rencontre entre toi, moi et mon frère ? Cela dépends aussi de la disponibilité de ton père si jamais cette proposition l'enchante. Une alliance plus ou moins directe entre Freeland et Prideland nous sera d'une grande aide dans le futur. Surtout que cette armée que fonde votre tyran ne semble pas seulement servir à faire joli, il vaut mieux se préparer à l'avance. Je suis d'ailleurs désolé de te faire profiter d'aussi grandes tirades. Je ne suis d'habitude que très peu bavard, mais ... je ne vais pas bien, alors je ressens le besoin de me confier. Encore navré.

Haki esquissa un sourire. Il n'en voulait pas à son interlocuteur bien sûr, cela lui avait fait du bien de parler à quelqu'un qui sache ce que c'était que d'avoir des responsabilités dont on ne voulait pas. Il n'avait jamais imaginé, ce matin là en se levant, qu'il ferait la connaissance d'un autre prince, celui de Prideland qui plus est, et que ce dernier aurait tant de choses en commun avec lui. Il lui proposait néanmoins un accord très intéressant, car personne n'ignorait que les lions de la fierté étaient puissants. Une alliance avec eux ravirait son père, cela ne faisait aucun doute. L'exilé avait la sensation d'avoir mis les pattes dans un sacré bourbier, mais il voyait en cet accord un espoir. L'espoir d'avoir lui aussi un clan, peut-être pas celui dans lequel il était né, mais un clan. Un clan qui l'accueillerait et qui n'attendrait pas de lui qu'il accomplisse de grandes choses. C'était peut-être pour cette égoïste raison qu'il allait rapporter toute cette conversation à Dejem et qu'il lui proposerait le rendez-vous avec Kumpa. Le lion à la crinière noire ajouta, comme porté par un souffle mystique.

- Tu sais, même si des personnes ne te penseront pas capable de gouverner, d'autre si. Ne réfléchit pas avec la peur comme moi. Mais avec ton cœur. Peut-être qu'en grandissant, tu retrouveras cette flamme, qui jadis te donnait envie de diriger cet immense royaume qu'est Freeland. Il suffit juste d'attendre de grandir. Et là, tu verras : Tu pourras enfin vivre une vie normale. Parce que contrairement à aujourd'hui, tes pas, tout comme les miens, ne sauront pas dirigés par la peur.

Damu avait beau semblé discret, Haki lui trouvait le talent oratoire des grands monarques. Le roi en ferait sans doute son conseillé lorsqu'il monterait sur le trône, et cette place lui irait à merveille. L'exilé se demanda en effet où était passé cette flamme qu'il avait enfant et qui le faisait s'imaginer sans mal comme le digne successeur de son père. Ce dernier avait toujours été habité par cette envie presque délirante d'être aussi bon et juste que Kundi, ce qui avait fait de lui un très bon roi le temps où il avait gouverné. Un peu jeune, parfois hésitant, il s'était montré honnête et impartial, poursuivant l'oeuvre de l'Unificateur. Quel genre de roi ferait-il, lui ? Il secoua la tête, songeant que ce n'était ni l'endroit ni le moment de se poser ce genre de question. Pour l'heure, il fallait organiser le rendez-vous et se dire au-revoir, car Haki ne pouvait pas rester toute sa vie à Prideland. Pas pour le moment du moins.

- Peut-être que j'ai encore cela en moi, mais je ne le ressens plus. Cela reviendra un jour j'imagine, et que cela remplacera mes craintes. C'est du moins ce que j'espère. Tu devrais toi aussi écouter ton cœur, ton âme est plus noble que tu ne semble le croire. Ta place est aux côtés de ton frère, et je suis sûr qu'il a réellement besoin de toi.

Il ne connaissait rien de leur situation à Prideland, rien de la relation entre Kumpa et Damu, mais il avait cette certitude. Il ne pensait pas se tromper en disant cela, car les monarques avaient toujours eu besoin de conseiller. Et il y avait fort à parier que le futur roi de Prideland ne souhaite pas garder Misaada comme majordome une fois qu'il serait monté sur le trône. Qui donc serait mieux placer qu'un membre de sa famille pour l'aider dans sa tâche ?

- Nous nous cachons aux Montagnes Humides, mon père et moi. Nous essayons de nous montrer le plus discret possible, alors je te propose de nous donner rendez-vous d'ici une demi lune, pour ne pas attirer l'attention. Je prie pour que ton frère accepte de nous rencontrer, mais je crois en vous.

Encore une vérité dite sur le coup de l'impulsion et de son instinct. Il sentait qu'il pouvait faire confiance à Damu, et également à Kumpa même s'il ne le connaissait pas. Le rencontrer serait un pas en avant pour les deux exilés, cela ne faisait aucun doute. Haki leva les yeux pour vérifier la position du soleil, il n'allait pas devoir traîner d'avantage ici.


[Désolée pour ce temps d'attente excessivement long, ces deux dernières semaines ont été très chargé ><]

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