Le soleil s’était levé avant moi, il triche. Il n’a pas besoin de dormir, alors il s’élève dans le ciel avant que je puisse ouvrir les yeux. Je m’étirai de tout mon long, mon petit corps se crispant alors que je poussai un petit grognement aigu qui vint se mélanger à mon bâillement. La grotte était clame et silencieuse, maman et Vita dormaient toujours. Je me levai donc en m’approchant discrètement de mon frère, venant mordiller sa queue pour l’embêter et l’extraire du sommeil profond qu’il ne voulait pas quitter.

«Vita! Hey… Réveilles-toi» Murmura-je pour ne pas déranger maman, sautant sur mon frère l’écrasant de mon poids avant de lécher son oreille droite. Je n’eus droit qu’à un grondement mécontent. « Viens jouer avec moi.» Je couinai en frottant mon museau contre sa gueule, mais cela n’y changea rien. Mon frère roula mollement sur le côté, me faisant tomber, avant d’aller se réfugier contre le flanc de notre mère. Je dû me résigner, je passerai la matinée seule… Je râlai brièvement, dans l’espoir que mon frère ait pitié de moi et décide miraculeusement de se lever. Mais je rêvai. Mon frère et moi adorions passer notre temps ensemble, mais s’il n’avait pas assez dormi, c’était différent.

Je gagnai donc l’entrée de notre grotte et sautillai gaiement sur les différents niveaux rocheux menant au chemin de terre devant notre chez-nous. La rosée n’avait pas encore séchée, j’arrivai donc au sol les coussinets humides. Je jouai un peu dans l’herbe pour les sécher et grattai un peu la terre avec mes griffes avant de reprendre ma route. Je marchai en reniflant le sol ici et là, en quête d’une activité qui m’occuperait jusqu’à ce que Vita se réveil. Je courrai jusqu’au pied de l’arbre auquel nous adorons grimper, m’amusant du fait que cette fois mon frère ne se plaindrai pas que je l’empêche d’avancer. Alors que je m’apprêtai à planter mes griffes dans l’écorce, je vis une grosse libellule. Je n’avais jamais apprécié leur goût, mais j’adorais les pourchasser. Elles volaient si vite!

Je plaquai aussitôt mes oreilles contre ma tête et bondissait à sa direction. Je plaquai mon ventre contre le sol et me dissimulai dans l’herbe pour m’assurer de ne pas lui faire peur. Je roulai des épaules, agitant lentement la queue, guettant le moindre mouvement qui me préviendrait de son envolé prochain…. J’avançai une patte lentement, la posant devant moi avant d’y mettre mon poids et de recommencer. Elle agita ses ailes et je me figeai. Mon cœur battait si vite! Elle bougea encore et je me jetai sur elle. Je la ratai de peu et je du rapidement me mettre à courir pour la poursuivre. J’étais juste derrière elle, bondissant de temps en à autre lorsqu’elle se mettait à zigzaguer. J’agitai les pattes devant moi pour tenter de l’attraper, mais je n’y arrivai pas.

Concentrée, je ne regardai pas là où je posai les pattes. Je savais que la libellule se dirigeait vers la termitière, Vita et moi nous nous y rendions trop souvent pour que je ne reconnaisse pas le chemin. L’herbe se faisait plus rare, mais malgré cela je ne vis pas la racine dans laquelle je me pris les pattes. Ce fut comme si le sol se dérobait sous mes pattes et je tombai. Le sol et le ciel se succédaient encore et encore et je compris que mon corps dévalait la petite côte menant aux nids de termites. Ce n’était pas douloureux, mais la terre sèche cognait contre mon dos et mes pattes.

Je finis ma course sur le flanc, emmêlée dans mes pattes et ma queue, la fourrure couverte de poussière. Agitant le museau, je me décidai à ouvrir les yeux. Mes grands iris orangés balayèrent les alentours. Plus de libellule. Je l’avais perdu… J’entendis alors du bruit et me crispai. Il y avait quelqu’un d’autre. Ohoh. Je me relevai rapidement et reculai en me recroquevillant, ramenant ma queue contre mon ventre. Je plaquai mes oreilles contre mon crâne, guettant autour de moi, inquiète. J’étais loin de la grotte maintenant…

Je vis alors une lionne. Plus âgée que moi. Je ne savais pas ce qu’elle faisait là, ni si elle était gentille. Elle n’était pas amie avec maman, je ne l’avais jamais vue avant… «B-Bonjour» Dis-je d’une petite voix, devinant bien qu’elle avait dû repérer mon odeur ou encore entendre ma chute. Cela ne servait à rien de se cacher ou chercher à m’enfuir. Elle était trop grande pour que je puisse lui échapper.

Ce regard. Il était mauvais. Cette lionne n’était peut-être pas méchante, mais les yeux qu’elle posait sur moi n’avaient rien à voir avec ceux qu’un étranger pose sur moi d’ordinaire. J’ignorais si c’était parce qu’elle ne pensait pas tomber sur un autre lion ou parce qu’elle avait de sombres pensées pour le moment, mais la lionne me rendait nerveuse. Je ne suis pas peureuse d’habitude, enfin, pas plus qu’un autre lionceau, mais quand on me regarde ainsi je peux sentir les poils sur mon dos se dresser. Lorsqu’elle répondit enfin à mon bonjour, je n’étais plus qu’une belotte de poils. J’étais presque complètement repliée sur moi-même, la queue entortillée à l’une de mes pattes arrières. Lorsque je remarquai qu’elle ne s’approchait plus de moi, je laissai mon corps se relâcher, m’ouvrant comme une fleur. Je me dressai sur mes pattes et toisai l’inconnue, incertaine.

«Tu es une Exilée?» Demandai-je timidement, me disant qu’il y avait trop de clan dans les environs pour tomber sur une autre voyageuse. Je savais où j’étais, alors je me disais logiquement que cette lionne était chez elle. Je supposai donc être sur son territoire et espérai qu’elle ne se montrerait pas agressive avec moi. « Je.. Je cherchais juste de quoi jouer…» Décidais-je de lui annoncer, me disant que moi aussi j’aimerais connaître les intentions des étranger venant chez moi. Je n’avais pas de clan, mais si un lion inconnu venait à la grotte où Maman, Vita et moi vivons, je voudrais savoir pourquoi. Contrairement à elle, je ne savais pas ce que ça faisait de vivre dans une grande famille et d’avoir des terres à protéger… Mais j’en rêvais. Je désirais tellement que Maman nous amène Vita et moi pour rejoindre un clan…